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Et pour dépeindre au plus juste ce monde, Scott Cooper s’entoure d’un casting de premier ordre. Rares sont ceux qui volent la vedette aux autres, même si on sent clairement que la part belle est donnée aux acteurs majeurs de l’histoire, Christian Bale, Casey Affleck et Woody Harrelson en tête.
Out of the furnace ne tente pas de se cacher sous un angle dramatique timoré mais assume clairement sa notion de noirceur profonde et jusqu’au-boutiste. Cette austérité de traitement est constamment inscrite dans un univers machiste pour les détracteurs du film. Difficile de leur donner tort quand les figures picturales du métrage se contentent régulièrement de représenter les hommes en train de boire, se battre, chasser, pour les clichés de surface. Versant opposé, cela impose une force et un poids majeur au film, une empreinte marquée. Sous un ciel gris, cette austérité ne peut forcément pas séduire la majorité des spectateurs. C’est avec cette substance que le réalisateur décide de forger son film. Probablement conscient des limites de son scénario dont il est également co-auteur, il mise, cette fois encore, tout sur sa direction d’acteurs, qui en plus du talent propre de ses comédiens, s’avère imparable.
Difficile de ne pas louer les prestations de l’ensemble du casting, Christian Bale, Casey Affleck, Sam Shepard, Woody Harrelson and Willem Dafoe. Casey Affleck brillant et constant depuis ses débuts, partage le haut du panier avec Christian Bale, encore et toujours magnétique. Ce dernier apporte d’ailleurs lors d’une scène, un intéressant contre-pied au machisme ambiant du film, livrant toute la sensibilité de son personnage. Il le porte de manière subtile, axe principal du scénario, et contient toute une violence et une brutalité muettes jusqu’à un point de non retour.
Malgré le manque d’ambition du script, somme toute classique, principalement basé sur un discours assez plat, sinon déjà-vu, de la vengeance et de la rédemption, Out of the furnace ne verse pas constamment dans une apathie dramatique. Il convient plus de voir le film comme une plongée profonde dans cette Amérique, rurale, en pleine crise économique, à la recherche d’une conscience sociale, de repères humains.
A travers cet ensemble nuancé, surgit de nombreux élans amplis d’un naturalisme fort de réalisme, dont une sublime dernière séquence, commune, mais brillante dans son impact. Moment crucial où les enjeux découverts et ressentis dés la première heure ne font qu’éclater aux yeux du spectateur.
Le réalisateur met de côté à ce moment précis, tout regard critique sur la loi du Talion, choix assumé, et se focalise sur son personnage principal, qui dans une dernière ellipse (effets de style récurrents dans le film, et montés de façon dangereuse mais intéressante) toute la « décharge » émotionnelle dont le long-métrage a besoin.
Dans un film qui n’offre aucune surprise, Scott Cooper centre tout l’intérêt sur ses personnages. Cela sera insuffisant pour attirer l’attention de la plupart des spectateurs. Mais, pour ceux qui voudraient s’approcher au plus près de la fournaise, le travail fournit par l’ensemble des comédiens, Casey Affleck et Christian Bale en tête, mérite toute notre attention. Surtout lors d’une conclusion qui dans un sublime plan, résume la radicalité de la mise en scène du réalisateur et convoque l’intelligence du spectateur. Faible de son enveloppe, fort de sa substance.