La critique est toujours à l'affût des nouveaux Tarkovski, Kubrick, Antonioni, Pasolini, Fassbinder et autres Fellini et Welles. Malheureusement il n'y a plus de grands maîtres de cette stature aujourd'hui. Simplement quelques faiseurs plus ou moins inspirés et quelques très rares, mais très très rares artistes. Ce mercredi est donc sorti MUD de Jeff Nichols, présenté par la critique, essentiellement française, comme un chef d'oeuvre (le jury cannois dans son ensemble a-t-il été si aveugle ?) réalisé par un immense et prometteur cinéaste, qui serait rien de moins que le frère caché de sa seigneurie Terrence Malick (qui se rapproche de plus en plus d'un Claude Lelouch du pauvre, notamment avec son dernier opus). La critique, donc, n'est plus à une aberration ou à un excès près. Car à y regarder de près et même de très près, MUD, avec ses coutures fort apparentes, n'est pas un chef d'oeuvre, beaucoup s'en faut, et Nichols n'est pas un grand cinéaste, simplement un petit faiseur malin et éclairé. Car comment se présente MUD ? ... Avec un scénario gruyère, mal foutu, plein de manques, assez naif, bourré d'emprunts ici et là, de personnages clichés et décors pauvres et tristes vus et revus jusqu'à la nausée dans le cinéma indépendant américain (syndrome Sundance), des dialogues insignifiants, des figurations chics et chocs qui n'ont absolument aucun os à ronger (Shepard, Whiterspoon qui fleurissent l'affiche mais n'apportent rien au film) ... un film sans rythme, sans vraiment d'histoire, sans émotion, sans inspiration ... une réalisation assez paresseuse et banale, voire simpliste (champ contre champ systématique entre les gamins et Mud) ... une fin ridicule et moraliste à souhaits, donc à l'américaine (la séquence de l'assaut est particulièrement mal découpée, on a l'impression qu'elle a été réalisée par un étudiant en première année cinéma) ... bref un film plutôt mineur avec certes, deux gamins plutôt justes et biens, mais un Mathew Mc Conaughey un poil caricatural qui frôle souvent le surjeu et qui nous propose, en tout cas comme dans ces deux derniers films, un jeu de plus en plus prévisible avec ses tics d'un acteur qui veut montrer qu'il est inventif et pleinement investi par ses rôles. Il y a enfin le détail qui anéantit tous les efforts du film et son cinéaste à rendre MUD plus fort et plus grand qu'il n'est dans sa petite réalité de film simplement acceptable : alors qu'il est très sale sur lui, mange avec ses doigts sales tel un animal affamé, porte la même chemise depuis la nuit des temps, bref se conduit tel un homme sauvage réfugié dans la forêt après un meurtre, Mud arbore une dentition d'une éclatante blancheur. Sans doute n'y avait-il pas de budget pour une maquille-patineuse spécialisée en dentition des éclopés de la vie. Sans doute aussi, la blancheur de ses dents est-elle due à l'usage d'un tube de dentifrice planqué au fond du bateau perché dans l'arbre. Comme se fait-il que Jeff Nichols ne nous donne aucune piste concernant ce tube de dentifrice ? Mais que fait la police des critiques cinéma ? ...