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gimliamideselfes
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4,0
Publiée le 10 juillet 2023
La (très) bonne réputation de ce documentaire n'est pas usurpée. On a un film qui impressionne dès son ouverture par ses choix musicaux, par son image léchée, où on voit des filles en vitrine en Thaïlande qui font du racolage pour attirer des clients en leur mettant des lasers dans les yeux pour attirer leur regard. La musique s'arrête et la réalité remplace cette image glamour de la prostitution. J'aime le parti pris de trancher d'un coup, d'arrêter brutalement le côté un peu clipesque pour proposer trois segments sur la prostitution à trois endroits du globe différents (Thaïlande, Bangladesh, Mexique), où on va nous montrer leur mode de vie, les différences, les similitudes...
Mais surtout on voit des choses qu'on a jamais vues ailleurs. Qui a déjà vu une prostituées en Thaïlande dépenser tout son maigre salaire pour entretenir un "beau mec" (enfin tout est relatif) dans un bar à hôtes (qui savait que les bars à hôtes existaient ?) ? De la même manière je ne suis pas certain d'avoir déjà vu des prostituées prier pour avoir beaucoup de clients avant d'aller au travail... De manière générale durant la partie en Thaïlande elles sont montrées comme des femmes comme les autres, elles vont au travail, elles râlent sur la concurrence le soir en mangeant ensemble... Et je dois dire que ce regard je le trouve assez original. Et en face on voit les mecs qui essayent de négocier, qui veulent faire "du sexe intense" et le mac qui essaye de dire : oui ben la 201 est très bien pour ce que vous voulez faire... Et le client qui dit : et la 231 ? Avec le mac qui en bon vendeur dit : non mais la 231 aussi hein ^^. On a des conversations assez lunaires comme ça où on a l'impression qu'on vend une bagnole dans une vitrine.
Mais les deux parties suivantes franchissent un cap dans le glauque, parce que si en Thaïlande on avait l'air d'être sur quelque chose à destination d'une riche clientèle étrangère... Au Bangladesh et au Mexique on se retrouve dans des bordels beaucoup plus sordides, où les filles savent qu'elles n'ont aucune chance de s'en sortir (je pense à cette ancienne prostituée devenue maquerelle qui sait que sa fille ne pourra jamais se marier car elle est enfant de prostituée et que donc elle va devoir elle aussi un jour se prostituer pour subvenir à ses besoins). C'est glaçant.
Au Mexique ils vont laisser parler un peu plus longtemps les clients qui expliquer qui viennent là parce que leurs copines sont prudes et que là ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent. Les mecs rôdent en bagnole autour de "la Zone" pour espérer repérer celle qu'ils aiment bien, celle qui les baise bien... Vraiment ça fait animal qui chasse. D'ailleurs les prostituées en sont bien conscientes et considèrent que ces mecs se comportement comme des animaux.
Mais le pire doit rester le barbier au Bangladesh qui explique qu'il y va deux fois par jours parce qu'il a des pulsions et que ça ce bordel aucune femme ne pourrait sortir et qu'elles se feraient toutes violées.
Et la force du film c'est que ce n'est pas misérabiliste, le réalisateur arrive à montrer les choses qui sont parfois vraiment très glauques comme elles sont. Celles qui ont peur de ne pas avoir de clients, celles qui ont pris leur retraite, celle qui semble aimer son métier (oui il y en a une...) et donc on se retrouve avec une diversité de témoignages, d'histoires qui permettent d'avoir une vision assez large et non réductrice de la prostitution.
Ce n'est pas tire larme... D'ailleurs la musique (on a du PJ Harvey... j'étais un peu aux anges) permet d'avoir quelques moments plus contemplatifs sur ce monde de la nuit et permet au spectateur de respirer un peu.
Un film qui commence par une ouverture digne du GOgo TAles de Ferrara sur une musique plutôt pénible, avec un défilé de danses superbement filmer laisse planer deux questions. Le réalisateur veut-il nous montrer ce que l'industrie du sexe fait miroiter comme symbole pour mieux s'en défendre, où cherche t'il à attirer l'oeil par équivalence cinématographique (toutes les scènes de bordels depuis le début du cinéma) ? Whore's Glory se refuse à dévider la pelotte de laine d'un sujet qui a étè peu mis en scène, le quotidien de la prostituée, il explore plus la vie des lieux qui semble le fasciner. Les entretiens des travailleuses, ne nous apprennent pas beaucoup que ce qu'on sait des réalités du milieu, le réalisateur ne prend pas non plus le temps de bien cerner l'une ou l'autre de ces héroïnes, le trip est d'immersion. A ceci s'ajoute l'apsect exotique, trois pays trois cultures qui ont toutes un point commun, les locaux sont les premiers consommateurs en masse des services. C'est quelque part le pouls d'un pays ou d'une ville (on ne sait pas) qui semble battre ici. L'occidentalisation et ses fantasmes en Thailande, la traditionnelle misére du Bengladesh, le christiannisme et ses dépouilles au Méxique. Le film est fort quand il est dans l'observation, dans l'attachement au groupe, moins pertinent, voir carrément France Dimanche quand il passe à des entretiens face caméra. Malgré sa bande son carrément tarte et son esthétique pas bien finaude, Whore Glory's reste un film attachant et plein de bonnes volontés, la partie au Bengladesh rend une lumière folle sur l'humain et ses désirs, elle m'est la plus chère.