Parce que le contexte du visionnage compte parfois, laisse-moi te planter le décor ami lecteur. Moi, AlterVorace, me retrouve donc échouée dans un canapé fort confortable. Il est près de minuit et mon cher et tendre époux -tiens, je suis de bonne humeur- ronfle allègrement à côté de moi. Je viens d'éteindre l'ordinateur -oui, oui, je suis sur le portable ET je regarde la télévision, pitoyable- dans le but fort louable d'aller me pelotonner dans les bras de Morphée. Sauf que j'ai la flemme. Oui, d'aller dormir. Donc je regarde d'un œil éteint ce qui passe sur l'écran. Tiens un film. Zut, j'ai regardé le début. Et quand je commence un film... ben je le finis. Ouais. Il faut dire que j'aime bien regarder des trucs au hasard sans rien connaître de l’œuvre en question. Le lendemain matin, j'ai même dû regarder sur le Net pour savoir quel était le titre du film que j'avais vu.
Je suis tombée amoureuse. Ne t'enflamme pas ami lecteur, je ne glisse pas une confession au milieu d'une innocente critique. Je suis tombée amoureuse de Valentina Cervi. Je ne saurai pas vraiment te dire pourquoi. Cette actrice m'a émue : je l'ai trouvé lumineuse, belle, fascinante.
Et je suis retombée amoureuse aussi. De Marthe Keller, toujours aussi grandiose.
Quant au film... Hum, hum, hum. Je ne suis pas tombée amoureuse. Non. Même pas le brin d'une bluette sans conséquence. Parce que ce n'est pas vraiment un film pour moi. Il a quelques qualités -à part ses comédiens-. Une ou deux jolies scènes sur le deuil par exemple. Mais le reste... Mon Dieu, le reste... Tu souffres du syndrome du parisianisme ? Tu lorgnes avec ravissement du coté de Saint-Germain ? Du milieu de l'édition ? Alors peut-être bien que tu apprécieras.
Le film s'ouvre avec la présence d'une voix-off qu'on se coltinera tout le long du film. Celle du héros, écrivain -forcément-, nonchalant et égocentrique -écrivain on a dit-. Cette narration masturbatoire est à l'image de ce que nous montre le réalisateur : maniérée et fermée au monde. On nous parle donc bobo. On nous parle vieille famille sur le déclin. On nous parle littérature. Ah ben non. Pas littérature, on nous parle milieu littéraire. On effleure les thèmes du deuil. On plonge dans l'adultère. On se noie dans un snobisme intellectuel de bas-étage.
Le personnage principal, Paul l'écrivain, est insupportable. Oui. Il promène sa mollesse en la dissimulant sous un amour nombriliste pour la belle Ada. De temps en temps il écrit. Parfois il pleure son père qui vient de mourir. Paul nous saoule de mots et de mornes silences. Le regard du réalisateur se confond trop avec celui du personnage pour apporter le recul nécessaire au milieu qu'il tente de mettre en scène. Quant à l'adultère, il semble presque sanctifié quand on présente le cocu comme un falot qui « travaille dans l’industrie du yaourt ». Mépris de classe.
Le vide abyssal du parisianisme nous saute à la figure mais n'est pas malmené, pas secoué, pas analysé donc pas intéressant. Si encore, les sentiments d'Ada était mieux mis en avant, on pourrait oublier le contexte. Hélas, c'est loin d'être le cas. On s'enlise dans les dorures et dans les soirées. Les histoires d'héritage -et donc la possibilité de peindre le déclin de cette vieille famille bourgeoise- manque de profondeur.
J'ai beau être tombée amoureuse de la belle Ada, le film ne mérite pas même un coup d'un soir entre deux portes. J'aurais dû aller me coucher.