Brillante scénariste connue essentiellement pour sa collaboration avec Jason Reitman ("Juno", "Young Adult") et la série "United States of Tara", Diablo Cody s'est un jour elle aussi essayée à la réalisation avec "Paradise", film de 2013 passé complètement inaperçu et conspué par une grande partie de la critique américaine.
Gravement brûlée à la suite d'un accident, la jeune et jolie Lamb (Julianne Hough) rompt avec les valeurs religieuses de la petite communauté évangéliste dans laquelle elle a été élevée et s'envole pour Las Vegas afin de succomber aux expériences qui lui étaient jusqu'alors interdites par sa foi. Là-bas, elle se lie d'amitié avec un barman séducteur (Russell Brand) et une chanteuse désabusée (Octavia Spencer)...
Quel drôle de truc, ce "Paradise" ! Alors que son très bon démarrage fracassant où Lamb annonce qu'elle renonce à croire en Dieu devant sa communauté nous installe dans tous les codes "codyens" habituels avec une héroïne s'enfermant dans le cynisme le plus noir suite à sa perte de repères, le film choisit le curieux contre-pied de l'envoyer directement dans la ville du péché par excellence. Dès lors, Lamb redevient instantanément cet agneau naïf égaré qui désespère de le rester dans un endroit rongé par le vice et, comme son héroïne, "Paradise" semble rapidement ne plus savoir où vouloir en venir avec tout ça.
Le regard innocent de Lamb contamine toute l'approche du film qui s'enferme dans une tonalité pleine de bons sentiments où l'humour sarcastique habituel de Diablo Cody peine à marcher à plein régime. Comme piégée à son propre jeu, la réalisatrice en devenir ne paraît plus savoir comment creuser ses personnages par ce prisme naïf et reste constamment à leur surface, se contentant de suivre leurs interactions avec un regard bienveillant et attendant simplement le moment où Lamb va réaliser ses mauvaix choix. Quelques jolis moments émergeront bien sûr ici et là, souvent avec Octavia Spencer d'ailleurs ou quand Lamb évoquera frontalement son accident et sa condition qui en découle, mais, enfermé dans son trop-plein de sentimentalisme, "Paradise" sera comme condamné à un éternel manque d'ambition qui lui sera fatal pour délivrer quoi que ce soit d'autre.
Même si, visuellement, tout n'est pas à jeter, les maladresses de Diablo Cody à appuyer en permanence chaque bon mot à la fin de toutes les séquences (en mode "gros clin d'oeil, regardez comme c'est bien écrit !") ou à chercher à dynamiser le récit en listant à l'écran chaque très gentil "péché" commis par Lamb ne seront pas les meilleurs des arguments pour nous convaincre de son réel talent de réalisatrice. Elle sera même prise en flagrant délit de contradiction quand elle fera dire à un inconnu vis-à-vis de Lamb "Tu n'a jamais été exposée à une quelconque forme de pop-culture ?... Waouh, quelle chance !" alors que son propre film en est simplement pétri de références jusqu'à faire réaliser de manière hilarante au personnage d'Octavia Spencer son propre rôle cliché dans cette histoire ("Comme dans les films, quand ce noir utilise sa sagesse noire pour aider un blanc en détresse...").
Soyons honnêtes, "Paradise" ne restera pas comme le premier film le plus honteux que l'on ait vu mais c'est néanmoins un véritable échec pour Diablo Cody : un échec d'abord scénaristique par une prise de risques se retournant étonnamment contre son auteure et ensuite un échec de réalisatrice qui se montre incapable d'imposer une véritable vision susceptible de rattraper la fadeur de son propos.
Depuis ce premier long-métrage oublié de tous, Diablo Cody s'est heureusement recentrée sur l'écriture de scénarios dont un nouveau pour Jason Reitman, "Tully", sans doute la plus sage des décisions...