S’étant fait un nom en tant que scénariste, notamment pour avoir couché sur papier le célèbre Drive de Nicholas Winding Refn, Hossein Amini passe à la réalisation avec The Two Faces of January. Son film s’inscrit dans une très stricte tradition du polar à l’ancienne, école Alfred Hitchcock, et nous promène en terres grecques et turques au début des années 60. Oui, The Two Faces of January est un pur film académique, mais soyons honnêtes, le dépaysement est total, les acteurs sont excellents et la patine vintage de la pellicule, assortie aux excellents costumes d’époque, font mouche et permettent d’outrepasser le manque d’originalité du film d’Amini, du moins ses fortes références. Il s’agit donc, pour l’occasion, d’une confrontation psychologie d’avantage que physique, entre un couple fortuné et un guide, tous les trois américains, dans un territoire touristique à mille lieues de leurs pays d’origine.
Mais qu’en est-il vraiment de chacun de deux protagonistes masculins? Le mari respectable et fortuné l’est-il réellement? Le jeune expatrié, guide à ses heures perdues, trop généreux pour être honnête, est-il une personne de confiance? Hossein Amini parvient parfaitement à instaurer un climat malsain autour de cette alliance forcée. Qui sera le plus malin? L’heure et demie que dure le film pose ces questions-là et la maîtrise de mise en scène du cinéaste permet de découvrir quelques scènes drôlement rythmées qui soulèvent toutes de grandes montées d’adrénaline chez les protagonistes. Le récit est rondement mené, à l’exception d’un final un brin téléphoné qui voit le cinéaste perdre pour l’occasion toutes ses valeurs scénaristiques précédentes. La psychologie des personnages étant un des moteurs du travail d’Amini, il apparaît dommageable qu’il s’oriente alors vers un final un peu standardisé.
Comme mentionné plus haut, le film est un dépaysement. La région du sud-est européen visitée, soit respectivement Athènes, La Crête et Istanbul, constituent chacun d’eux un personnage à part entière. Tout commence bien entendu par une visite en mode sépia du mont Olympe, de son Parthénon. La suite nous dirigera vers la principale des îles grecques pour que tout se termine dans les rues grouillantes de la métropole turque. Les images sont splendides, le cinéaste ayant sélectionné avec soin ses arrières plans, ses décors et les ambiances qui vont avec. Un sans-faute, techniquement, alors que dans le fond, le film, passablement court, n’est qu’un enchevêtrement de références aux modèles du réalisateur, à Hitchcock, comme dis plus haut. Quoiqu’il en soit, le voyage est agréable.
Il convient par ailleurs de souligner que The Two Faces of January est un film d’interprétation. Pour cela, le tandem Oscar Isaac, vu récemment chez les frères Coen, en l’infatigable Viggo Mortensen, monstre du charisme, remplissent parfaitement leurs contrats respectifs. Le jeune acteur tient parfaitement la dragée haute à un comédien bien plus expérimenté qui signe ici sa plus honorable interprétation, selon moi, depuis Les promesses de l’ombre. Les deux acteurs étant excellents, ils ne sont pas pour autant bien accompagné puisque la femme, incarnée passivement par Kirsten Dunst, semble bien pâlichonne en rapport à ses collègues masculins. Pour conclure, saluons donc la tentative honorable de Hossein Amini et son respect pour ses aïeux. Nous espérons donc retrouver le bonhomme avec sa casquette de réalisateur très prochainement mais pour une œuvre cette fois-ci plus personnelle. 14/20