Basé sur le roman éponyme de John Le Carré, "Un homme très recherché" est un excellent thriller d’espionnage honteusement boudé par le public dans les salles. Pourtant le casting est attrayant, avec la présence de Daniel Brühl, Rachel McAdams, Willem Dafoe, et du regretté Philip Seymour Hoffman. Mais je pense qu’en dépit de sa joliesse, l’affiche pose un problème car elle semble spoiler le film. Grande erreur ! Car l’affiche est à l’image du long métrage : elle brouille les pistes. Entre l'affiche et le début du film, on aurait tendance à penser que c’est Philip Seymour Hoffman qui est tant recherché… Et c’est ainsi que nous sommes invités à suivre les investigations des services de renseignements allemands, encore sous le coup d’avoir abrité sans le savoir le groupuscule de terroristes à l’origine de l’horrible attentat contre les tours jumelles de New York. L’entame commence donc de façon surprenante, et il n’en faut pas plus pour piquer notre curiosité à vif. Et c’est là que le triptyque scénario-réalisation-montage fait parler toute sa précision pour garder sans difficulté le spectateur devant l’écran tout au long des deux heures, emmené par un Philip Seymour Hoffman au sommet de son art sous les traits de Günther Bachmann. Visiblement fatigué avec ses cheveux parfois hirsutes et la mine défraîchie, à tel point qu’on s’étonne presque qu’il n’envoie pas tout valser, c’est pourtant par l’intermédiaire de ce personnage que le rythme va être donné. Il m’a fait penser au lieutenant Colombo (Peter Falk). Si, si ! Parce que sous son air de rien, les deux hommes ont en commun une capacité d’analyse de la situation et une intelligence hors du commun. Sauf que là, le caractère donné à Günther a permis d’insérer une pointe de dramaturgie. Oh elle est succincte, mais elle y est. Mené à un rythme très changeant mais toujours fluide par Philip Seymour Hoffman accroché à son os plus que jamais (marquant ainsi ce film de son empreinte de façon indélébile), nous irons de surprise en surprise au cours de cette difficile enquête où chaque service en lice veut avoir le dernier mot. N’ayez cependant aucune inquiétude par rapport aux surprises : il y en a quelques-unes oui, mais elles sont le fruit de diverses manipulations, pressions, et même des faux discours ponctués par de fausses promesses. Et tout cela va jusqu’aux seconds rôles, lesquels contribuent eux aussi à la qualité de ce film vraiment au point à tous les niveaux. Pour exemple, nous aurons un joli face à face entre Günther et Jamal (Mehdi Dehbi). Que dis-je : poignant ! Et à l’instar de cette scène, c’est une vraie démonstration de force qui nous est donnée tout au long de ce métrage, boostée par une belle photographie et la partition de Herbert Grönemeyer (qui a même endossé un rôle) venue renforcer les moments importants. Le twist final ne manque pas de surprendre (ah… encore ?) pour notre plus grand bonheur, sauf qu’on ne sait pas ce que les personnes appréhendées deviennent. C’est rageant, mais conforme à l’opacité des services de contre-espionnage…