Quand on n'a rien à attendre d'un film, on est sans doute plus disposé à lui trouver des qualités, même mineures, même paradoxales. L'atroce Aronofski, l'un des cinéastes les plus pénibles, et, par là même, les plus surévalués des derniers 20 ans, s'attaquant à un sujet lourdement créationiste, donc insupportable de ce côté de l'Atlantique... soit la parfaite recette pour un désastre cinématographique aux proportions... bibliques ! Et de fait, entre adaptation genre heroic fantasy, scénario redoutablement bête (accumulation de clichés pénibles rendus totalement incohérents par le... contexte), militantisme végétarien lourdingue, effets spéciaux un peu pourris, acteurs peu convaincants, en dehors du toujours impeccable Russell Crowe - qui porte la seconde partie du film sur ses solides épaules -, tout va mal dans ce "Noé" qui semble concourir allègrement pour le titre du plus gros navet de l'histoire. .. Sauf que, curieusement, les obsessions habituelles - puériles, certes, mais indéniables - d'Aronofski, à force de jouer contre la logique du "blockbuster catastrophe" qu'est inévitablement "Noé", et d'emprunter des voies improbables - toute cette naïveté hallucinée dans l'illustration des "mythes" de l'Ancien Testament -, deviennent touchantes, et que le naufrage esthétique et intellectuel du film ne manque finalement pas de panache. En outre, la seconde partie, avec Noé en "fou de Dieu", est suffisamment "tordue" pour avoir irrité les fondamentalistes chrétiens, et permet à Russell Crowe de montrer qu'il est encore un acteur. Ce qui n'est pas si mal, un acteur qui résiste et fait son boulot au milieu de ces paysages islandais tellement à la mode aujourd'hui et d'effets spéciaux qui se contentent de recycler généreusement le "Seigneur des Anneaux" aussi bien que "2012"...