Faut dire que depuis son rôle dans l'incroyable Drive de Nicolas Winding Refn, Ryan Gosling est un peu le driver dans tous ses films - c'est bien sur infondé, mais c'est vrai que les premiers visuels de The Place Beyond The Pines de Derek Cianfrance (à qui on devait déjà Blue Valentine aussi avec Gosling - sorti à peu près en même temps que Drive si on considère sa présentation à Cannes) pouvaient prêter à confusion : un Gosling qui semblait limite autiste, qui roule sur sa belle moto à défaut de rouler dans sa belle voiture, une histoire d'amour avec Eva Mendes à défaut de Carey Mulligan, et la bande-annonce rendait difficile la compréhension du propos du film - avant d'avoir des premiers retours, je croyait même que c'était un thriller entre les personnages de Ryan Gosling et Bradley Cooper. Mais The Place Beyond The Pines n'est rien de tout cela.
Le nouveau film de Cianfrance choisit le challenge risqué de raconter une histoire en trois "chapitres" bien distincts, chacun basé sur l'un des trois acteurs principaux : Ryan Gosling, Bradley Cooper et enfin Dane DeHaan, la star du génial Chronicle, sur lequel la promo n'a malheureusement pas été axée - il faut dire que son segment est quand même moins long que ceux des deux premiers. Ça parait simple comme ça, mais The Place est très complexe - d'une intelligence dévastatrice, tissant avec calme et sagesse les relations entre père et fils. C'est remarquable, la façon dont ces idées sont apportées le sont de manière si originale - c'est bluffant, complètement désenchanté : j'ai rarement vu un film aussi désespéré et aussi triste, rarement j'ai eut autant les tripes à l'air dans une salle de cinéma. Un scénario démentiel, porté par une mise en scène tout aussi intelligente - les plans de dos, qui ont une grande importance dans la mise en scène de Cianfrance, deviennent hypnotique. C'est lumineux, rétro, mais noir aussi, obscur même parfois - Cianfrance magnifie Gosling, y a une vrai alchimie comparable à celle qu'il a aussi avec Refn entre l'acteur et le réalisateur.
Casting irréprochable - Gosling a un charisme inné que très peu d'acteurs ont, Bradley Cooper, après son excellente performance dans Happiness Therapy, confirme tout le bien que l'on peut penser de lui, ici dans son meilleur rôle à ce jour, bien plus complexe qu'en apparence, Dane DeHaan, qui est définitivement l'un des meilleurs acteurs de la nouvelle génération, et on attend avec impatience son rôle dans le prochain Spiderman. Enfin Eva Mendes, que j'ai jamais put blairer mais qui ici s'en sort super bien. On applaudit aussi avec intérêt les apparitions de Mahershalalhashbaz Ali (merci le copier/coller) que j'ai découvert dans House of Cards, et de Ray Liotta, le grand.
Une excellente bande-originale pour enrober tout ça, et The Place devient hypnotique, fascinant, triste, dément et tragique. Cianfrance est à suivre, car ce The Place est en bonne place pour se classer parmi les meilleurs films de 2013.
Incroyable - Grandiose - ce sont les mots qui ressortent de ce The Place Beyond The Pines quand on reste cloué sur son siège à la fin de la séance. « Qu'est-ce que je viens juste de voir ? » Complexe, magnifiquement visuellement et aux acteurs excellentes, mais aussi surprenant car se réinventant à deux reprises. Une grande oeuvre, un chef d'oeuvre oserons-nous dire. Rares sont les films qui donnent envie d'en parler juste après les avoir vus - dégoûtant que la promo est été aussi bâclée sur le sol français.