Et oui, cela peut paraître évident, mais il fut un temps où James Bond n'était pas encore la marque déposée qu'elle est devenue, « seulement » des livres d'espionnage appréciés des amateurs adaptés pour la première fois au cinéma. S'il y avait un minimum d'ambition, notamment dans la production, pour que celle-ci devienne une franchise, impossible alors d'imaginer un avenir aussi radieux, le résultat s'avérant... convenable. J'avais même prévu d'écrire potable, mais cela aurait été un peu sévère, notamment pour cette première heure globalement plaisante. Dépaysement évident, intrigue plutôt bien troussée, du sexy sans vulgarité... On se prend au jeu concernant cette intrigue gardant une bonne part de mystère, ponctuée par quelques scènes vraiment réussies
(le tout premier « Bond. James Bond », l' « attaque » de la mygale, les ordres menaçants via haut-parleur d'un docteur No contre son homme de main, l'exécution par 007 de ce même homme de main, la mythique apparition d'Ursula Andress (même si, personnellement, j'avoue une petite préférence pour la « toute première James Bond Girl », la splendide Eunice Gayson)
, pour ne citer qu'elles), l'ensemble, ni trop sérieux ni trop décontracté, gardant aujourd'hui un certain charme. Le problème, c'est que lorsqu'on regarde un titre comme celui-ci aujourd'hui, c'est forcément avec notre vécu de spectateur contemporain, ayant vu défiler 23 (bientôt 24!) James Bond, avec tout ce que cela implique comme évolution, sur la forme comme le fond. Cette impression était particulièrement sensible dans la dernière partie sur l'île, où non seulement les motivations du docteur No m'ont paru pour le moins confuses, mais surtout, ce décor souterrain sur fond de nucléaire a tellement été vu par la suite qu'il est difficile d'y voir quelque chose de nouveau alors que cela devait être hyper-novateur en 1962. J'en suis sorti légèrement blasé, tentant de prendre du recul sans y parvenir totalement, à l'image de quelques passages vraiment expédiés
(la mort de l'antagoniste principal, notamment)
. Heureusement, Sean Connery s'impose dès les premières secondes comme une évidence dans le rôle-titre, lui qui restera toujours la référence pour l'immense majorité des spectateurs, aussi méritants aient été certains de ses successeurs. Une fois n'est pas coutume, le premier ne sera pas le meilleur, loin s'en faut, mais aura eu le grand mérite de lancer la plus longue franchise du septième art, et qui sera on ne peut plus au cœur de l'actualité en 2020. Après tout…