Premier film mettant en lumière James Dean dans un rôle principal, ""A l'est d'Eden" s'avère être un mélodrame d'exception. Elia Kazan (le réalisateur) met parfaitement en scène une histoire complexe et passionnante. Deux fils opposés par tout, l'un rebelle (Cal, James Dean) et l'autre modèle (Aaron, Richard Davalos), connaissent des chemins différents auprès de leur père. L'histoire nous est rapportée du point de vue de Cal, qui mène une vie complexe : alors que son frère fait la fierté de son père, Cal ne parvient pas à trouver une place dans la famille. L'image du père est omniprésente dans les films d'époque pour sa partialité ou sa soumission ("La Fureur de Vivre" par exemple), et cette oeuvre de Kazan ne déroge pas à la règle. Reste l'image de la mère, bien plus complexe ici puisqu'elle occupe divers statuts suivant les personnes : alors qu'Aaron la croit morte, Cal découvre qu'il n'en est rien. Bien que l'histoire tourne autour de la mère et des différents moyens de la retrouver, il semble que l'intrigue repose en réalité sur la personne du père. Pas si hasardeux que cela, puisque Cal tente à tout prix d'obtenir le respect de son père. L'intrigue s'impose comme un reflet de la société d'époque, que l'on peut toutefois reprendre comme universelle : un des enfants est privilégié par la figure paternelle, souvent avec partialité.Cette histoire touchante est rendue possible par le travail remarquable de Kazan, dont la mise en scène nous fait part d'un réalisme prenant vis-à-vis des différents événements. La musique est brillante, elle convient parfaitement au film et à la narration du quotidien mystérieux, imprévisible de Cal. James Dean détient ce charisme naturel qui fait de lui un acteur à part. Il en découle un sentiment d'empathie de notre part pour le frère "mauvais" (il se définit comme tel) qui échoue dans tout ce qu'il entreprend, en dépit d'une volonté de bien faire déconcertante. Les différents décors appuyent l'idée d'un personne sans cesse en mouvement ( un champ, un train sur lequel il voyage par moments, la fête foraine). La copine d'Aaron, Abra (Julie Harris), apporte son côté touchant à l'intrigue, et adopte un rôle de médiatrice entre deux frères trop différents pour se comprendre. La fin se veut bienveillante et encourageante, on retient toutefois de ce long une profonde recherche d'identité de Cal dans une famille qui ne lui témoigne aucune affection. Cette quête de vérité (du côté maternel) et d'amour (du point de vue paternel) s'impose comme un voyage initiatique qui fait sans aucun doute de Cal, frère désabusé au commencement, un homme nouveau à son épilogue. "A l'Est d'Eden" est un film qu'il ne faut pas oublier, une aventure humaine en tous points aboutie.