La comédie musicale "My Fair Lady" est l'une des nombreuses adaptations du mythe de Pygmalion et de Galatée. Il prit naissance chez Ovide, poète latin
dont l'ouvrage Les métamorphoses traite du mystère de la création artistique et exalte le pouvoir de l'art. Celui de l'artiste qui modèle son oeuvre et découvre, avec émerveillement, qu'elle prend vie. La métaphore de la statue devient un idéal à atteindre, le vivant invité à imiter l'art.
A partir de ce scénario, Alan Jay Lerner et Frederick Loewe vont écrire un livret et une partition musicale pleins de charme et de fantaisie qui feront fureur sur les scènes américaines, puis anglaises. Ayant assisté à l'un des spectacles, George Cukor eut l'idée d'en faire un film à grand spectacle, avec une mise en scène fastueuse et des vedettes capables d'attirer les foules dans les salles obscures. Rex Harrison, qui avait déjà joué sur la scène de Broadway, fut de nouveau choisi pour tenir le rôle du professeur Higgins et lui prêter sa distinction, son élégante désinvolture, sa coquette ironie. Il est parfait dans ce personnage qui lui va comme un gant. Par contre, Audrey Hepburn, sur laquelle George Cukor jeta son dévolu pour interpréter la petite marchande de fleurs Eliza, ne correspond pas du tout au modèle. Et c'est là où le bât blesse. La performance demandée à l'actrice n'est pas celle de changer une fille des rues en aristocrate, mais de se changer, elle la déesse, en souillon. Et le contre-emploi est ici trop énorme. Pour cette raison et pour d'autres encore, je n'ai pas totalement adhéré à ce film. Certes, il y a des scènes magnifiques et Audrey Hepburn, par la suite, nous enchante de sa grâce et de son charme ; la mise en scène est somptueuse mais cède parfois à l'exubérance, si bien que l'on a l'impression de se trouver dans l'arrière-salle d'un antiquaire ; les costumes sont eux aussi surchargés et la délicieuse Audrey ploie sous les atours. Mais il y a de beaux moments et ce film se laisse regarder avec plaisir.