D'Emmanuelle Bercot, j'avais bien aimé "En solitaire", et bien sûr le récent "La tête haute". Dans "La fille de Brest", elle retrace le combat du Dr Irène Frachon, pneumologue que sa pratique avait amenée à suspecter l'implication du Mediator dans la dégénérescence des valvules cardiaques de ses patients, et la survenue de ce fait chez eux de gravissimes insuffisances cardio-respiratoires, parfois mortelles. De proche en proche, le cynisme et la mauvaise foi de la firme Servier aidant, I. Frachon (magistralement campée par la rayonnante S.B. Knudsen, encore plus investie que pour sa belle prestation au côté de Luccini dans "L'hermine") se décide au combat, médical, administratif et juridique. Elle élabore un dossier à charge, très documenté et progressivement irréfutable du point de vue statistique. Elle a la chance de réussir à mobiliser à ses côtés quelques belles personnes dans son milieu professionnel (B. Magimel, surprenant avec vingt kilos en trop, est un scientifique convaincant), dont l'aide sera précieuse pour faire éclore le scandale qui entraîna récemment le retrait du médicament...
Le vrai plus du film, c'est d'avoir fait de cette histoire exemplaire un thriller haletant plutôt qu'un docu ennuyeux, sans négliger pour autant les aspects techniques qu'il réussit à nous faire comprendre. Il faut saluer la construction scénaristique où le dosage habile de la tension dramatique, alternant avec des "respirations familiales" et des séquences de lâcher-prise (je pense aux coups de colère de Frachon/Knudsen à l'occasion desquels elle lâche des jurons dans sa langue natale qui nous mettent en joie), contribue à créer chez nous la révolte et l'enthousiasme, à nous impliquer à fond...
Je n'ai même pas envie de dénigrer le côté un peu...manichéen que prend le personnage christique d' I. Frachon, ce docteur courage que sa famille soutient sans jamais douter, cette beauté exemplaire, inflexible, soutenue par une telle puissance affective chez ses proches. Ca paraît parfois presque trop mais après tout c'est une histoire vraie, pas vrai ?..
Ce film coup de poing est une réussite. Utile à nous ouvrir les yeux, il l'est. Espérons qu'il le sera aussi aux victimes pour l'obtention des aides que Servier traîne peut-être encore à prendre en charge (ce dernier point est un peu flou) !