"La Fille de Brest" est un film absolument magnifique sur la détermination d'une femme forte à faire triompher la vérité au service des autres alors que tous les éléments sont contre elle et qu'elle n'est a priori pas la mieux placée pour mener ce combat
(étant ni cardiologue, ni spécialiste de la recherche, ni habituée des médias, ni au courant des ramifications judiciaires)
. Labos, lobbys et institutions de santé qui la prennent de haut, manque de moyens humains et financiers, peur de tout perdre, scepticisme de certains journalistes, collègues coincés par leurs intérêts personnels, les obstacles sont nombreux et font de cette histoire un véritable thriller médical rythmé, captivant et alternativement révoltant et porteur d'espoir. Au-delà de l'affaire du Médiator en elle-même, le scénario montre avec justesse l'impact de cette enquête sur la vie d'Irène Frachon, méprisée de toutes parts, submergée par la brutalité de ses adversaires, qui craint que sa voiture soit sabotée, qui sacrifie sa vie de famille (ses enfants et son mari) et qui a un besoin compulsif de faire la fête pour évacuer le stress et qui vit des moments très rudes, comme les opérations à coeur ouvert, les autopsies crues
(l'horreur et la colère qui se lisent sur son visage quand elle tient le coeur de sa patiente décédée)
, jusqu'à la délivrance salvatrice, même si aucune condamnation n'a été encore prononcée. En tout cas, l'émotion transpire de quasiment toutes les scènes et le film le doit aussi beaucoup à l'excellente Sidse Babett Knudsen, qui met tout son talent, son énergie et son coeur, et dont l'accent danois ajoute au côté atypique du personnage. Enfin, et c'est un vrai plus par rapport à la couverture médiatique de l'affaire, "La Fille de Brest" met en avant les autres personnages ayant contribué à la révélation du danger du médicament, comme l'espion de la CNAM, la journaliste du Figaro, l'éditeur du livre, l'équipe autour d'Irène et Antoine Le Bihan, protagoniste plus nuancé incarné avec justesse par Benoît Magimel. Relater l'affaire du Médiator sur plus de 2 heures de film était un sacré pari, et il est pleinement réussi, "La Fille de Brest" étant un film coup de poing très intense, poignant, très bien interprété et réalisé avec passion par Emmanuelle Bercot.