Même John Goodman n’y peut rien. Oui, Todd Phillips, dans l’élaboration de son volet de clôture de la trilogie de la meute, aura préférer travailler avec les pieds. Le constat est amère lorsque l’on se remémore la vivifiante comédie délurée introduisant les personnages d’Alan, Stu et Phil à Vegas il y a quelques années. N’ayant jamais été un modèle de pudeur et de finesse, ici, la franchise prend carrément des allures de grand foutoir, mettant en exergue toutes les faiblesses d’écriture de l’équipe de Phillips hors du simple cadre de la gueule de bois. Oui, l’on pouvait franchement rire à s’en taper les cuisses des lendemains de hier de notre bande de potes trentenaire, même si le second film était une copie conforme du premier, mais ici les choses diffèrent singulièrement. Revenant sur des rencontres faites dans un état second, nos amis doivent démêler un conflit entre deux truands pour revoir vivant leur ami Doug, toujours le même.
Une fois encore, c’est Zack Galfianakis et son personnage d’Alan qui prend la tête du peloton. Mais pour le coup, Alan n’est plus un simplet mais un malade mental, Phillips exploitant son désormais caractère handicapant comme une maladie dégénérative de mauvais goût. Le comédien, bien dirigé, était un monstre de comédie, mais ici, laissé pour compte à l’écriture, il devient pour ses amis mais aussi pour le public, un boulet bien plus pesant qu’à la normale. Alors que Bradley Cooper et Ed Helms semblent faire leurs possibles pour garder le film sur les rails, c’est finalement le personnage de Chaw, le truand asiatique, qui vient achever toute tentative de faire un film vraiment drôle. Grossier, obscène et complètement débile, le personnage du petit chinois est une véritable plaie pour ce troisième volet de la série, un clou dans le pied, un furoncle aux fesses. Complètement dégénéré, le gaillard plombe littéralement l’ambiance.
Faisant de ses fêtards maladroits des vagabonds dans la mouise, Todd Phillips fait également d’eux des personnages bien plus faibles, sortis de leurs contextes habituels. S’il était marrant de les voir se découvrir de nouveaux tatouages, de nouveaux amants, femmes ou animaux de compagnie, il est beaucoup moins attrayant de les voir se renifler avec un collier de chien autour du coup ou d’escalader une façade de casino. Comment Todd Phillips aura-t-il fait pour faire perdre à ses personnages presque cultes tout leurs potentiels comiques? Eh bien, il aura simplement fallu dépasser les limites du bon goût. Oui, ici, Phillips est allé trop loin, bouffi d’orgueil et sûr de son fait, le metteur en scène, qui n’avait qu’à ressortir le bout de son nez pour amasser de l’argent, s’est encoubler sur le seuil de la porte. Dommage.
Pour ne pas cracher impunément sur le troisième film de la série, soulignons tout de même qu’on l’en rit tout de même, bien que l’on en rit parfois jaune. Alors que tout commence très mal avec la séquence de la girafe, drôle dans le fond mais pas dans la forme, quelques scènes franchement drôle viennent tout de même illuminer le visionnage de ce film que l’on est forcé de qualifier de décevant. Au terme d’une trilogie très prolifique et surtout très lucrative, l’on se dit que le petit génie que l’on voyait en Todd Phillips n’en n’est peut-être pas vraiment un. Reste maintenant au réalisateur de passer le pas et surtout de passer à autre chose, avec peut-être, le même succès. 06/20