Cinq avant sa mort, l'inégalable Sergio Leone conclut sa trilogie consacrée à l'histoire des Etats-Unis, après Il était une fois dans l'Ouest et Il était une fois la révolution. Oeuvre testamentaire du réalisateur italien, Il était une fois en Amérique aboutit après plus d'une année de tournage entre New-York, Toronto, Rome, Venise, et même Paris. Aujourd'hui classé comme l'un des plus grands films de l'histoire du cinéma, ce (très) long-métrage reste difficile à classer et regroupe plusieurs genres à lui tout seul. Loin d'être uniquement un film de gangsters, il s'agit également de l'histoire dramatique d'une bande de cinq amis d'enfance, d'une romance idyllique mais tourmentée, ainsi que d'une fresque historique présentant quarante années de l'histoire contemporaine américaine, des années 1920 aux années 1960.
A travers cette oeuvre ayant demandé des moyens financiers énormes et une douzaine d'années de travail, Sergio Leone déroule le fil d'une histoire inspirée d'un roman de l'écrivain américain Harry Grey et adaptée dans un scénario de 317 pages. Un projet ambitieux sur Leone a préféré se concentrer, écartant par la même occasion sa participation à l'adaptation du roman de Mario Puzo : la saga du Parrain. D'ailleurs, il serait raisonnable d'apporter une précision lorsqu'on se lance dans la comparaison de ces deux films contemporains, aux aspects semblables. En effet, bien que s'inscrivant dans le milieu mafieux, il s'agit là de leur seul point commun car Il était une fois en Amérique aborde bien plus de thématiques et le schéma narratif se rapproche davantage du tableau complexe de 40 années d'une vie mouvementée, plutôt que d'un centrage sur le milieu mafieux sicilien.
Une fois la longue difficulté de trouver un producteur résolue, Leone se lance dans son projet et collabore pour la huitième fois avec un autre artiste de génie : Ennio Morricone. Une entente dont il sort une musique exceptionnelle et inoubliable (qui est d'ailleurs produite près de dix ans avant la sortie du film tant sa mise en oeuvre a été longue), qui retranscrit à la perfection la mélancolie des souvenirs d'enfance du personnage principal. Précisons d'ailleurs, sans dévoiler la moindre trame du scénario, que ce chef d'oeuvre musical est magnifié par une scène légendaire du cinéma, au ralenti et au pied du pont de Manhattan, que l'on peut d'ailleurs apercevoir sur l'affiche du film.
Après une dizaine d'années de préparation, Sergio Leone achève enfin la réalisation de son projet. Toutefois, une autre épreuve l'attend face aux producteurs, décidés à raccourcir la durée de l'oeuvre. Initialement, le réalisateur italien pensait que la durée idéale du film serait de 6 heures. Mais la Warner Bros, qui le produit, est quelque peu refroidie à l'idée d'un tel gouffre financier, quelques années seulement après l'échec du film 1900, d'une durée de plus de 5 heures. Un premier montage de 4 h 25 est donc soumis, mais il est refusé par la production. Sergio Leone se résout donc à effectuer plusieurs coupages, jusqu'à atteindre la version que l'on connait aujourd'hui de 3 h 41. C'est cette version qui a été diffusée en Europe, mais il faut savoir qu'à l'époque, la Warner Bros n'était toujours pas convaincue et a distribué le film dans les salles américaines en effectuant son propre découpage, raccourcissant le film à une durée de 2 h 19. Cette modification entraîna la suppression d'un certain nombre de scènes essentielles à la compréhension du film et dénatura totalement la nature de l'oeuvre, ce qui provoqua un scandale et démoralisa Sergio Leone, qui ne tourna plus aucun film jusqu'à sa mort. On remercie donc la Warner Bros pour avoir fait preuve d'une telle étroitesse d'esprit...
Mais depuis, et fort heureusement, la version de 3 h 41 a été réhabilitée et consacrée comme l'une des meilleures créations de l'histoire du cinéma. Toutefois, ce film est également l'un des plus sous-estimés auprès du grand public car il ne profite pas de la notoriété qu'il mériterait. Peut-être est-ce justement en raison de sa durée qui a du refroidir plus d'une personne. Pourtant, se laisser porter par l'univers de Sergio Leone et faire confiance à son talent reste une assurance pour vivre une expérience profondément humaine.
Pour le casting, de nombreux acteurs et actrices ont été approchés, mais la distribution finale offre tout de même de belles têtes d'affiches. D'abord, évidemment, l'indétrônable Robert de Niro, aussi à l'aise dans l'incarnation d'un rôle mafieux que ne l'est son acolyte Joe Pesci, également présent à l'affiche après leur rencontre dans Raging Bull (1980) et avant Les Affranchis (1990) et Casino (1996). Ensuite, l'apparition au cinéma de Jennifer Connelly, qui tient son premier rôle dans la peau de Déborah dans l'âge de l'enfance.