Un très bon film fantastique et merveilleux, très divertissant et très poétique. "Miss Peregrine et les enfants particuliers" est un beau retour en force de Tim Burton qui prouve qu'il est encore capable de nous émerveiller avec son cinéma. Pour ce film, il décide d'adapter le roman à succès de l'auteur Ransom Riggs, intitulé "Miss Peregrine et les enfants particuliers", un conte fantastique parsemé de photos mystérieuses d'enfants étranges et inquiétants. L'histoire est celle de
Jake Portman (Asa Butterfield), qui est un jeune adolescent timide de 16 ans menant une vie paisible en Floride. Un soir, il reçoit un appel de son grand-père Abe (Terence Stamp), dont il est très proche, qui semble en proie à la panique. ll se rend chez lui pour découvrir son appartement vandalisé et, non loin de là, le corps de son grand-père dont les yeux ont été arrachés. Avant de mourir, Abe parle confusément à Jake d'une boucle, du 3 septembre 1943, et d'un oiseau. Bouleversé par la mort de son grand-père, Jake se confie à son psychiatre, le Dr Golan (Allison Janney). Il lui rapporte les histoires fabuleuses que lui narrait son grand-père dans sa jeunesse à propos d'un pensionnat pour enfants au Pays de Galles gouvernée par une certaine Miss Alma Peregrine (Eva Green), des enfants doués de capacités surnaturelles qui y vivaient ainsi que de sa chasse effrénée de monstres dont la description correspond à celui vu par Jake après la mort d'Abe. Ses parents s'inquiétant de son état mental, le Dr Golan conseille à Jake de se rendre sur les lieux de ce pensionnat, peut-être encore existant, afin de tourner définitivement la page. Jake et son père Frank (Chris O'Dowd) se rendent donc au village de Cairnholm, perdu sur une île du Pays de Galles. Là-bas, il y fait la rencontre de Miss Peregrine et des enfants particuliers, coincés dans une boucle temporelle pour protéger les enfants qui vivent donc chaque jour la même journée et qui ne vieillissent pas. Mais le danger guette car un groupe de Particuliers renégats, menés par le grand méchant de l'histoire, M. Barron, ont cherché à acquérir l'immortalité mais ce fut un échec : tous furent transformés en monstres humanoïdes nommés Sépulcreux, ou simplement Creux (ou Fauchers-du-Néant ou Fauchers au Québec). Pour retrouver forme humaine, ces créatures doivent se repaître des yeux de Particuliers. C'est pourquoi ils ont attaqué la boucle temporelle et M. Barron attire Jake dans un piège et capture Miss Peregrine, et les enfants vont tout faire pour la délivrer
... Partant de ce livre qui semble avoir été écrit pour lui, Tim Burton se fait plaisir et nous propose une histoire familiale, magique et sombre à la fois qui concentre l'essentiel de ses obsessions : des enfants marginaux et étranges vivants dans un manoir caché du monde, des créatures filiformes et angoissantes, une forte imagerie macabre typique de son cinéma (forêt sinistre, squelettes, marionnettes...) et l'utilisation du procédé de stop-motion qui lui est si chère. Tous ces éléments réunis donnent au film une force visuelle très appréciable. En effet le film est esthétiquement très réussi et Tim Burton a fait le choix d'utiliser un minimum d'effets numériques et cela se ressent à l'écran. La photographie est très travaillé, les décors sont sublimes et très bien rendus en servant magnifiquement l'histoire, de même que les costumes absolument magnifiques. Les effets spéciaux sont quant à eux très réussis également. Concernant le casting, c'est un sans faute et les acteurs semblent prendre un grand plaisir devant la caméra, que ce soit les enfants tous plus attachants les uns que les autres ou même le personnage de Jacob qui de par sa banalité et son impuissance face à la menace finit par devenir attachant. Mais pour moi c'est clairement Eva Green qui tire son épingle du jeu en incarnant une Miss Peregrine autoritaire et protectrice envers ces enfants, elle crève l'écran de par son élégance et sa beauté que Tim Burton sublime avec sa caméra. Concernant les méchants, Samuel. L. Jackson s'amuse et cabotine parfois un peu trop mais il reste mémorable et repoussant à souhait. Tim Burton prend le temps d'installer une ambiance mystérieuse autour de cette île avant de nous embarquer dans une histoire complexe mais passionnante avec ces enfants particuliers. Une fois lancé, le film est relativement riche en péripéties et Tim Burton glisse de nombreux clins d’œil à des œuvres célèbres qu'il affectionne. Il sera facile de voir des similitudes entre le personnage de Mr Barron, le grand méchant du film, et le tueur psychopathe de "Shining" ainsi que de nombreuses références aux œuvres de Ray Harryhausen ou des productions Universal ("Frankenstein", "L'Homme invisible"...). Malgré de nombreuses qualités, le film pourrait perdre le spectateur durant son acte final qui accumule quelques incohérences (pourquoi les enfants particuliers ne se manifestent pas plus que ça lors du combat final, alors qu'ils ont des pouvoirs si puissants ?) et des facilités scénaristiques et qui tombe parfois dans une surenchère venant ternir l'expérience. Tout l'affrontement final se révèle quand même assez intéressant avec tous les enfants particuliers qui usent de leurs talents particuliers, le tout dans des décors de parc d'attraction et de fête foraine très réussis (même si le grand méchant Mr. Barron est vaincu de manière ridicule et avec un quiproquo extrêmement stéréotypé). Le film peut également devenir difficilement compréhensible pour les gens n'étant pas familiers avec le roman et il est dommage de ne pas avoir donné plus de cohérence à une œuvre qui pouvait côtoyer les meilleurs films du réalisateur (en ce sens, tous les moments de l'histoire concernant les boucles spatio-temporelles sont très mal gérés et sont incohérents) mais qui ne parviendra pas à devenir plus qu'un très bon conte pour enfants. Tim Burton revient quand même aux sources de son cinéma avec une histoire adaptée du livre de Ransom Riggs et écrite par Jane Goldman. Si l'histoire contient quelques facilités et incohérences, l'ensemble reste captivant. Subtil mélange des "X-Men" et de "Harry Potter", "Miss Peregrine et les enfants particuliers" est original et se distingue dans la filmographie du réalisateur. En effet, j'ai senti que Tim Burton se renouvelait dans son style bien que ses thèmes propres soient toujours présents. Je suis allé voir le film avec le moins d'informations possibles, la surprise fut bonne. Asa Butterfield campe le personnage principal avec efficacité, bien qu'il ne dégage aucune émotion. Au niveau des personnages, chacun a sa fonction et chacun marque à sa façon car en plus d'être attachants, on retrouve ce regard très empathique de Burton pour les "freaks" lui permettant d'être très attentionné dans sa manière de gérer ses personnages. Concernant ceux-ci, ils sont tous assez intéressants de par leurs divers talents spéciaux (j'ai beaucoup aimé les personnages de Emma (personnage très attachant), Olive, Claire, Millard, Horace, Hugh... On aurait par contre aimé en dire autant pour les méchants de l'histoire, très caricaturaux et avec un leader bien trop loufoque et caricatural pour être pris au sérieux. Le tout manque finalement un peu d'enjeux dramatiques car le film peine à trouver une menace palpable malgré quelques tentatives intéressantes (à ce niveau, certaines scènes sont vraiment flippantes et assez dérangeantes, avec un côté très sombre, voir glauque, ce qui est très appréciable dans un divertissement familial). Cependant, j'ai trouvé le personnage d'Enoch assez peu intéressant (bien que sa particularité de
pouvoir manipuler des êtres désarticulés qu'il anime avec un cœur
en jette énormément) et
sa jalousie vis-à-vis de Jacob assez déplacée et mal justifiée, bien qu'au final il a une évolution par rapport à sa relation conflictuelle avec le héros, mais son histoire d'amour avec Olive n'amène à rien
. Mais le pire reste la romance totalement niaise, vide et insipide entre Jacob et Emma (et qui a un côté assez malaisant
puisqu'elle en pinçait déjà pour le grand-père du héros
). Il y a donc des clichés propres aux teen movies qui amoindrissent légèrement la qualité de ce film. Mais le film vaut avant tout pour son visuel, même si certains effets spéciaux sont assez ratés, il y a un travail assez exemplaire sur l'ambiance et la direction artistique. Aidé par une photographie somptueuse, le tout part vers des fulgurances expressionnistes assez emballantes, chose qui faisait la force des films de Tim Burton mais qu'il semblait avoir perdu il y a quelques temps. On retrouve son obsession de la banlieue déshumanisée malgré son aspect très chatoyant et on retrouve ses vieilles obsessions horrifiques, entre le mythe de Frankenstein avec les jouets d'un des enfants et une séquence d'expérience bien fichue ou alors la forêt oppressive et hantée comme lorsque le héros découvre
l’agression sur son grand-père
au début du film, une scène à l'atmosphère délicieuse et habilement mise en scène. On retrouve même une référence directe à "Sleepy Hollow" avec le design si particulier du méchant qui renvoie à celui du Cavalier sans tête. Tim Burton se fait donc plaisir avec une mise en scène bien plus proche de ce qu'il avait l'habitude de faire, il distille une ambiance plus malsaine par moments, parfois même proche d'un glauque jubilatoire. Après il s'appuie un peu trop sur des effets déjà vus, comme
le plan du bombardement
qui manque d'inventivité ou encore
la séquence du bateau qui émerge hors de l'eau
qui est devenue un des grands classiques hollywoodiens. Au niveau des thèmes abordés, on y retrouve le décalage avec le monde réel, l'existence d'êtres rejetés par la société, la fuite de la réalité vers l'imaginaire, et même la violence de la Seconde Guerre mondiale, le mal-être adolescent ou encore le passage à l'âge adulte. Et il faut reconnaître que ce film est celui qui possède les plus belles fulgurances burtonniennes de ces 10 dernières années. Il apparaît ici moins comme sa propre caricature et il arrive sans trop de mal à imposer une patte salvatrice à son film qui s'extirpe du tout venant. Il renoue avec ce qu'il faisait de mieux, tout en retrouvant la sincérité de ses débuts, surtout dans sa manière très touchante de porter un regard sur les "freaks". Donc même si ces fulgurances se font encore rares par rapport aux rouages traditionnelles du film moderne, il faut reconnaître qu'il fait un pas vers la bonne direction conférant tout son charme au film. Tim Burton change donc de style pour notre plus grand plaisir. "Miss Peregrine et les enfants particuliers" est donc pour moi un très bon divertissement légèrement entaché par quelques maladresses du scénario et quelques excès liés à ce genre de production. Il reste que le film est relativement atypique pour une production hollywoodienne de ce type, et il est fortement recommandé pour passer un très bon moment de cinéma