Après l’excellent "Bons baisers de Bruges" qui avait surpris son monde en empiétant, avec talent, sur les plates-bandes de Tarantino, le réalisateur Martin McDonagh était forcément attendu au tournant. Et, sur le papier, son "7 psychopathes" avait une sacré gueule en promettant un ton résolument barré, une mise en scène inventive et un casting de toute beauté. Malheureusement, McDonagh s’est laissé un peu trop emporté par sa créativité au point de faire de son second film un monstrueux patchwork d’idées pas forcément bien articulées entre elles… et qui ne parviennent pas à masquer la vacuité totale du scénario ! On a droit, pêle-mêle, à une arnaque à base de chiens kidnappés, à un serial-killer mystérieux, à des flash-backs plus ou moins fantasmés, à des séquences oniriques ou encore à un mafieux très méchant… sans véritable fil conducteur, si ce n’est le manque d’inspiration du scénariste joué par Colin Farrell. Ce joyeux bordel aurait pu donner un bon film (Tarantino, Tony Scott ou encore Oliver Stone y son bien parvenus avec "True romance" ou encore "Tueurs nés", auxquels on ne peut pas ne pas penser) mais "7 psychopathes" manquent, pour ça, d’un storytelling de qualité, d’un sujet fort et fédérateur (on ne comprend pas ce qu’a voulu dire le réalisateur ici) et, surtout, d’un ton juste et cohérent. Et c’est sans doute le principal défaut de "7 psychopathes" : il est bien trop violent et dramatique pour un film qui se veut drôle et barré. Certes, "Bons baisers de Bruges" n’étaient pas avares de morts brutales mais ici la violence est sans doute trop explicite et dessert considérablement le sujet puisqu’elle fait perdre beaucoup de légèreté à l’intrigue. Plus que les flash-backs et leur effusions gores (les égorgements, les mises à feu…), c’est davantage la mort de certains personnages qui m’a profondément dérangé puisqu’elles s’inscrivent en parfait décalage avec le ton arboré par le film par ailleurs. Heureusement, McDonagh peut compter sur un formidable casting d’acteurs en roue libre qui se sont fait visiblement plaisir. Etonnement, Colin Farrell est un peu en retrait, son personnage étant davantage spectateur qu’acteur et souffrant, ainsi, d’une certaine passivité. Autour de lui, on retiendra, davantage l’excellent Sam Rockwell en acteur raté aux idées démentes, un Christopher Walken flippant de stoïcisme, un Woody Harrelson terrifiant de jusqu’au-boutisme ou encore Tom Waits en invraisemblable tueur au lapin. Autres points forts, ses dialogues qui s’avèrent souvent savoureux et certaines séquences complètement démentes qui parsèment le film, sans fil conducteur malheureusement. "7 psychopathes" est donc bien trop bordélique pour espérer être une réussite mais le jeu des acteurs permet de passer un moment presque acceptable. Espérons que "Bons baisers de Bruges" n’était pas un heureux accident…