Voila un film qui m'a rendue parfaitement heureuse. Un film US, of course. Et c'est pas cette semaine que j'honorerai le cinéma français! Avec l'insipide et inutile Temps de l'Aventure, je vois la B.A. d'un truc qui s'appelle Les gamins. Qui dégouline de tant de bêtise et de vulgarité qu'on se dit: c'est pour nous dissuader d'aller le voir, ou bien? Pire: ils ont fait un film avec l'Ecume des jours. Osé. Le film de la jeunesse, de l'insouciance frappée par la mort, eh bien, on a choisi les trois pires comédiens de leur génération -trois vieux chevaux de retour qui ont 20 ans de plus que les héros de Boris Vian, non, mais vous imaginez la miss Tautou, avec sa tête de vieille fille précoce, qu'on se demande si elle nous fait pas un peu de progeria, en Chloé! Elle a 18 ans, Chloé, ma pauvre Toutou! Et elle est jolie, forcément jolie, elle! Au fou!
Le meilleur du cinéma US, c'est de prendre un grand sujet de société -le lobby des armes, les erreurs judiciaires, les industriels du tabac- et de lui rentrer dans le lard. Spang! la NRA! Spong! les cigarettiers. Le tout carré, clean, peigné dans le sens du poil, servi par des comédiens exemplaires. Ici c'est Matt Damon, acteur-producteur. On en voudrait, des comme ça, chez nous à la place de nos petites vedettes qui se croient intéressantes et s'imaginent avoir de l'humour. Sur Matt Damon -sa vie privée- on ne sait rien. Juste, qu'il n'a JAMAIS tourné dans une bouse....
Et voila que se présente aux Sydney Lumet de demain un nouveau thème porteur: l'exploitation du gaz de schiste! Et là, y a et y aura du grain à moudre. Steve Butler, Matt Damon donc, prospecte avec sa collègue Sue (l'excellente Frances McDormand) toute une région où sa compagnie se propose de lancer des forages. Il s'agit de convaincre le maximum de paysans de vendre leurs terres pour débuter l'exploitation. Steve ment un peu sur la valeur du gisement espéré pour vendre a minima, mais il n'est pas foncièrement malhonnête. Il n'a juste, pas d'états d'âme. Il est là pour vendre, il vend. S'est il intéressé aux conséquences des forages? Pas du tout, ça, c'est l'affaire des gens qui l'emploient.
C'est une bien jolie campagne -mais pauvre. Là comme ailleurs en Europe, culture ou élevage ne payent plus. Pour ces fermiers, c'est l'occasion d'avoir d'un seul coup plus d'argent qu'après des années de labeur. Steve est né dans l'Iowa, dans un village de bouseux comme ceux là -il se flatte donc de savoir exactement ce qu'il faut dire aux vendeurs potentiels, il les connaît, il est l'un d'entre eux. Il faut se fondre dans la population, aller au bar, se rendre sympathique, organiser éventuellement une kermesse. Mais quand un des premiers enthousiastes convertit son pactole en voiture de sport, il tord le nez. Cette irresponsabilité ne lui plaît pas.
Il trouve devant lui un opposant inattendu: un vieux prof de collège, Frank (l'excellent Hal Holbrook). Renseignements pris, Frank, retraité, enseigne pour le plaisir mais est docteur en physique et a travaillé pour de très grosses firmes; il est écouté, et il persuade ses concitoyens qu'ils doivent voter. Et là dessus, tombe du ciel un jeune écolo, Dustin (John Krasinski) représentant une ONG dont personne n'a jamais entendu parler, qui vient expliquer les ravages faits dans sa famille au Nebraska par une même exploitation: terre empoisonnée, bétail crevant....
Je vous laisse le soin de connaître la suite -et, une fois de plus, les moyens extrêmement retors des industriels. Reconnaissons que la fin cucul-la-praline ne vaut pas un pet de lapin; que le personnage de la jolie institutrice (Rosemarie DeWitt), parce qu'il fallait bien une nana dans le paysage, est parfaitement inutile, mais que film n'est, finalement, pas si manichéen que cela et qu'il remplit son rôle: faire réfléchir en distrayant;
Gus Van Sant est un cinéaste inégal, tantôt c'est bien tantôt ça l'est moins. Promised Land, c'est très bien. A voir