En ma grande qualité de rien du tout, je vais me permettre de donner quelques petits conseils aux jeunes cinéphiles et cinéastes qui rêveraient de marcher dans les traces du grand maître Van Sant. Premier conseil : si tu veux faire un film engagé et militant pour dire que le gaz de schiste, c'est caca et c'est dangereux et que ceux qui l'extraient et l'exploitent, ce sont tous des enculés (tout cela est d'ailleurs probablement très vrai, je n'en sais rien), évite de le faire financer par le pognon du pétrole d'Abu Dhabi, ça sera moins suspect. Deuxième conseil : si tu veux dénoncer des fumiers qui n'hésitent pas à utiliser de sales procédés retors et manipulateurs pour arriver à leurs fins, eh ben n'en utilise pas non plus pour arriver aux tiennes, abruti, ça sera plus productif. T'es Gus Van Sant, merde, pas M. Night Shyamalan ! Troisième conseil : ne laisse pas tes deux acteurs principaux écrire le scénario -même si ce truc a très bien marché pour toi par le passé ("Will Hunting")-, ça sera moins insupportable que de les voir comme ici se distribuer les bons rôles du gentil et du méchant et, hop !, de switcher quand ça les arrange. Quatrième conseil : c'est très bien d'attacher de l'importance à des petits détails bien sentis (les VRP du gaz qui achètent des nippes de ploucs pour se fondre dans leur cœur de cible...) mais il ne faut pas pour autant perdre de vue la cohérence de l'ensemble, ça sera plus crédible. Là, franchement, l'épiphanie et la conversion du salesman cynique à la Oliver Stone qui devient un agneau idéaliste à la Frank Capra juste parce que ses boss l'ont pris pour un con et parce qu'une jolie bouseuse lui a fait un sourire, c'est un peu dur à avaler ! Cinquième conseil : si t'as la chance d'avoir Frances McDormand au casting, donne plus d'importance à son rôle, cette fille est géniale. Sixième conseil : idem pour Hal Holbrook, et je rajouterai que ça serait pas plus mal de lui refiler un rôle dans le style de ceux qu'il avait quand il était (plus) jeune, des rôles de traîtres et de crapules ("Magnum Force", "La Nuit des Juges"...) ou des rôles de types dans l'ombre, qui connaissent les ficelles ("Les Hommes du Président"...), parce que là, il y en a un peu ras-le-bol de voir des vieux acteurs jouer les grands sages simplement parce qu'ils ressemblent à une momie ayant la tremblote. Dernier conseil, enfin, en forme de constat : le coup du style cinématographique qui s'efface devant la puissance du discours, tu nous l'as déjà fait avec "Harvey Milk" et, déjà, c'était pas franchement convaincant...