Il y aura certainement eu un avant et un après « Slumdog Millionaire » pour Danny Boyle. 377 millions de dollars amassés à travers le monde pour une mise de départ de 15, l'Oscar du meilleur réalisateur en poche, la mise en scène de la Cérémonie d'Ouverture des Jeux Olympiques 2012 de Londres plus tard – mêlant grandiose et humour, solennité et spectaculaire, il apporte une touche originale et parfois audacieuse à la grande messe de présentation des athlètes – voilà le Monsieur de retour derrière les caméras de cinéma avec le très attendu « Trance ».
« Trance » réunit un casting melting-pot plus qu'alléchant avec le scottish James McAvoy, le frenchy Vincent Cassel et la jolie actrice us Rosario Dawson.
Danny Boyle est de retour très en forme. Son « Trance », thriller Hitchcockien et Brian De Palmaien (forcément!), transcende : manipulation sinueuse et pernicieuse de l'esprit, renforcée par un montage hyper nerveux signé Jon Harris, le monteur de « Snatch », « Kick-Ass » et « 127 heures » entre autres, ainsi qu'une BO frénétique tonitruante composée par Rick Smith (membre du groupe Underworld).
Loin d'une atmosphère sombre des nombreux thrillers noirs classiques, Danny Boyle se détache des caractéristiques du film de braquage pour emmener son récit vers une œuvre plus inattendue. S'approprier l'univers du film noir pour mieux le moderniser, en somme !
L'intrigue de départ assez simple – le vol d'un tableau et l'utilisation de l'hypnose comme moyen de récupération de l'œuvre d'art – se transforme, en effet, petit à petit en un objet de plus en plus impénétrable et tortueux, au plaisir du spectateur, noyé dans les méandres de l'esprit de Simon, incarné par un James McAvoy charismatique.
Au vu de la filmo du bonhomme – « Le Dernier roi d'Ecosse », « Reviens-moi », « Wanted », « X-Men : Le Commencement » – on se demande pourquoi – comment le talentueux James McAvoy, à l'accent prononcé, n'avait jamais travaillé auparavant avec le metteur en scène anglais. Il livre ici une prestation haute voltige dans un rôle difficile à négocier, celui d'un homme tantôt dominé tantôt dominant, dont le cerveau subit la même ambivalence de charme.
Le script astucieux de John Hodge, scénariste des quatre premiers films de Danny Boyle, permet à ce dernier d'explorer également les thématiques des comportements humains extrêmes, pouvoir de la suggestion, instinct de conservation, cupidité désespérée, violence des rapports et subconscient.
Le réalisateur de « 28 jours plus tard » scotche son audience par sa mise en scène excentrique mais maîtrisée de bout en bout, rappelant le style de ses premiers longs (« Petits meurtres entre amis » et « Trainspotting »), et tisse en toile de fond une sublime mise en abîme de l'Art, l'art sous toutes ces formes. On lui pardonnera une dernière demi-heure un poil trop riche en rebondissements, assez improbables, qui dénaturent un peu l'ensemble.
On notera dans les points forts de « Trance » une photographie hallucinante, coordonnée par Anthony Dod Mantle, collaborateur de longue date de Boyle, qui transmet l'idée de « transe » sans être trop explicite quant à la définition et à l'essence de cet état, ainsi qu'un impact phonique percutant, redevable à Simon Hayes, qui accorde une importance toute particulière aux voix et aux sons du film.
McAvoy est accompagné par Rosario Dawson, plantureuse et vénale en hypnothérapeute au placard rempli de squelettes. Avec en bonus un full naked shot à faire exploser les compteurs de visites du site Mr Skin ! Dans « Trance », on croise également Vincent Cassel, qui interprète avec brio un personnage – criminel agissant seul ou presque, sans famille, sans hiérarchie, sans plan B, sans organisation ou structure, complètement prisonnier d'un labyrinthe édifié par lui-même, qui enterre la simplicité initiale.
Bilan : Thriller psychologique étonnant et inclassable, « Trance », la nouvelle prouesse de Danny Boyle, surprend par son approche émotionnelle, son scénario à la fois complexe et dense, et sa mise en scène frénétique, qui ravira certainement ses fans de la première heure, oui, ceux qui, tout jeunes, furent biberonnés au crépusculaire « Petits meurtres entre amis » et au visuel « Trainspotting ».