Ken Loach, dont le dernier Looking for Eric m'avait déçu, n'a jamais été un réalisateur qui m'a attiré, ses peintures sociales me laissant toujours un goût amer d'inachevé. En se réfugiant en Écosse, il plonge au cœur du quotidien de Robbie, un jeune homme au passé chargé, en témoigne la cicatrice qui fend une partie de sa joue. Pourtant, dans cette vie de galère un rayon de soleil semble percer : La naissance du petit Luke, son fils.
C'est cette naissance qui donne tout son intérêt au film. Elle incite le changement, implique un nouveau départ, et c'est un vent de renouveau qui plane sur le long-métrage, où le personnage est pris par le désir de s'envoler avec sa petite amie et son bébé, de fuir tout ce qu'il a connu jusqu'à présent. Mais difficile de fuir quand on est pourchassé continuellement. Et c'est en cela que son responsable de travaux d'intérêts généraux et ses nouveaux collègues vont essayer de l'aider à sortir la tête de l'eau.
Dans un univers très cru, où les actes et les paroles témoignent d'elles-mêmes, c'est soudain une dose majeure de raffinement qui va enivrer les personnages. Exit les pub du coin et bienvenue dans les séances de dégustation de Whisky, où le verre semble être une œuvre d'art. Robbie y va trouver un échappatoire, d'abord de la curiosité, et enfin du talent, ce qui va lui ouvrir de nouvelles portes. Le contraste du monde souillé dans lequel il évolue et de la pureté de celui qu'il découvre est particulièrement intéressant. C'est la rencontre de ces mondes qui devient l'élément central du film, source d'humour et d'idées salvatrices.
Ken Loach filme ses personnages sans artifices, tout est très simple, épuré, ce qui correspond au thème même du film qui creuse dans les profondeurs sociales. Il y a quelques moments forts et le rapport entre le passé, le présent et le futur du personnage est bien orchestré. Les autres personnages, bien que secondaires, apportent aussi leur contribution à un film qui tient sur toute la longueur sans temps morts et sans recherche d'effets dramatiques exagérés. C'est donc une réussite que ce La part des Anges, dont le titre est d'ailleurs très bien choisi et en parfaite corrélation avec le film en lui-même.