Le temps est une notion aussi étrange que relative. Selon la version officielle d’Allociné, La Vie d’Adèle durerait 2 heures et 59 minutes tandis que Violette ne durait que 2 heures et 19 minutes. Vous qui cherchez obstinément le secret de l’immortalité, je vous le livre donc : armez-vous d’un bon coussin et de quelques provisions et courrez visionner Violette en boucle dans le cinéma le plus proche, il est alors probable que le temps finisse par arrêter de s’écouler, lui-même terrassé par l’ennui. Je vais maintenant faire plus court, en ayant déjà perdu une somme considérable ce soir*, de temps.
Martin Provost a apparemment voulu faire un film sérieux. Un film profond. Un film douloureux. Un film qui sache subtilement évoquer la petite musique d’une époque. Un film où les répliques et les mots interrogent implacablement et longuement des spectateurs bouleversés par le niveau d’intensité dramatique proposé à l’écran. Un film avec des vraies performances d’acteurs, pénétrant totalement toute la vérité de leurs personnages. Un film avec assez d’audace narrative pour vibrer comme si l’on tournait les pages d’un roman. Un film d’où l’on sortirait finalement en se regardant et en esquissant un sourire, sans trop savoir comment exprimer toute la beauté de cette expérience dans toute sa complexité.
Tout cela, il l’a peut-être réussi, ou peut-être pas. Une chose est certaine en revanche : il a fait un film long, très long.
On voit finalement trop de films en pensant que le rythme le plus élémentaire servant à les animer est un minimum syndical. Manquant cruellement de cet ingrédient dès le début, Violette a tout de même au moins un mérite, celui d’être constant. Froid et ennuyant au début, au milieu puis à la fin, le film se rattrape par son principe de continuité, souligné par un étrange séquençage en chapitres, qui n’apporte à peu près rien. D’un semblant de souffle de vie, il est par contre entièrement dénué.
Témoin du pénible fantasme d’une après-guerre tellement idéologisée et intellectualisée dans ses moindres refonds que tous les personnages s’expriment comme s’ils étaient les personnages d’une (mauvaise) pièce de Sarte ou Genet, Violette agite des pantins, marionnettes et objets inanimés pendant de longues et pompeuses séquences dont il ne ressort généralement pas grand-chose, alors que la quête de l’émotion primitive semble pourtant être toute l’ambition du film.
Ne valant finalement, faute de tout parti-pris clair, que par la redécouverte d’une œuvre littéraire aujourd’hui largement oubliée, celui-ci semble même incapable d’en tirer profit, malgré un cadre historique et littéraire qui aurait pourtant pu se révéler propice à un vrai et intéressant tableau d’époque. Plombé par ailleurs par une bande-son aussi macabre que soporifique, Violette ressemble au final à un mauvais tableau impressionniste où un peintre aurait surexposé les couleurs et les teintes jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une vague impression de gâchis.
Aussi désespérément nombriliste et répétitif que son héroïne, il finit d’ailleurs par se rendre lui-même aussi antipathique que celle-ci, ce qui n’est pas rien.