Sono Sion, j'adore, j'adhère. Troisième film que je vois du bonhomme et une nouvelle fois on a le droit ici à une oeuvre atypique, forte et audacieuse. Si je devais résumer Guilty of Romance en quelques mots, je dirais que c'est un tourbillon poético-charnel, un objet de fantasme.
Le film prend une dimension quasi-psychanalytique en traitant la thématique du désir sexuel, désir ici refoulé par l'épouse d'un écrivain qui ne la touche pas et lui fait vivre le rôle de la parfaite femme au foyer. Sono nous exécute la peinture de ce masque social qui tombe et des pulsions endormies qui brutalement se réveillent, progressivement on entre dans un cauchemar éveillé où navigue Izumi cette femme tiraillée entre ses "obligations" sociales et ses désirs.
GoR est une oeuvre baroque qui ne semble souffrir d'aucunes limites, qui semble être le fruit d'une imagination débordante qui aurait carte blanche. Ce film est bien malsain mais aussi terriblement envoûtant. Je n'ai pas été embarqué comme j'ai pu l'être par Love Exposure mais j'ai été terriblement conquis par ce film. Sono ose, et ça fait plaisir de voir ça dans le paysage cinématographique actuel. Visuellement déjà ce film est une grande réussite, Sono semble avoir mûri dans sa mise en scène, peut-être grâce à de meilleurs moyens mais en tout cas on a le droit à une forme très propre et à des séquences admirablement menées. On y retrouve cette poésie morbide typique de Sono, c'est fou. Des scènes marquent par leur ingéniosité visuelle, citons celle sous la douche et une bonne partie se déroulant dans le "château". GoR semble s'être aussi inspiré directement de l'Empire des sens d'Oshima dans le simple fait de montrer des corps qui se désirent et expriment ce désir, des corps dictés par leur sens où toute les limites morales et sociales fixées par l'homme sont totalement gommées quand éclate ce désir primaire, celui du plaisir charnel.
Réussite esthétique, Guilty of Romance reste aussi une oeuvre profondément dense. Outre le désir sexuel il y a des questionnements sur l'homme, sur l'amour, sur les rapports de domination-soumission, sur les déviances, sur les moeurs... Dans ce cyclone voluptueux représenté à l'écran il y a matière à s'interroger. La femme est ici largement mise en avant, en tant qu'être sexuel à part entière. Sono ne se prive pas également de nous livrer un pur défilé érotique qui sert pleinement son propos, qui n'est pas gratuit. GoR est un film qui navigue entre poésie, érotisme, surréalisme et fantasme.
Une nouvelle fois d'un point de vue artistique, on peut louer le fait que Sono évite le didactisme. Son film est divisé en chapitres mais cela ne rend en rien son film linéaire. Il y a une véritable intelligence narrative dans ce film à laquelle on pourrait tout de même reprocher une certaine répétition qui malheureusement fait retomber le soufflet à plusieurs reprises, ce qui m'empêche de crier au chef d'oeuvre car il subsiste encore quelques maladresses. Mais ces maladresses ne sont rien face à l'étendu du génie artistique dont Sono nous fait preuve encore une fois et il me tarde vraiment de découvrir sa filmo en profondeur.
Troublant et fascinant, GoR respire le cinéma, respire les idées et s'en sort avec les honneurs