Markus Schleinzer a travaillé comme directeur de casting de 1994 à 2010 et a développé plus de 60 projets de films, tels que La Pianiste et Le Temps du loup de Michael Haneke. Il s’est aussi occupé du casting des enfants du film récompensé Le Ruban blanc, en étant leur coach pendant le tournage.
Michael Fuith, l’interprète du criminel, s'est beaucoup documenté pour travailler son personnage, et n'a pas hésité à s'investir à 100 % pour le rôle, peut être un peu trop selon le metteur en scène Markus Schleinzer : "Il a affronté tout ça avec une grande sincérité et il a fait un excellent travail, mais je lui souhaite que son prochain rôle soit très différent", affirme-t-il.
Markus Schleinzer a déjà beaucoup travaillé avec des enfants : "Sans toutes ces expériences, je n’aurais pas osé me lancer dans Michael", confie-t-il. Le réalisateur assure également avoir donné la possibilité au jeune comédien de réfléchir lui-même à ce qui pouvait arriver à son personnage. Petit détail : dans la cave, tous les dessins que l'on voit sont de lui.
Le plus important pour Markus Schleinzer concernant l'enfant séquestré, était "la sincérité absolue", sans pour autant exclure leur accompagnement par rapport à cet enfant tout au long du processus de tournage : "trouver des parents qui ne se contentent pas d’autoriser leur enfant à jouer ce rôle, mais qui soient aussi des interlocuteurs intéressés ; trouver un enfant qui ait suffisamment de talent, et qui ait un ancrage sain et fort dans sa propre personnalité", assure-t-il.
Markus Schleinzer déclare ne pas avoir voulu faire de sentimentalisme ni de surenchère émotionnelle dans son film, et c'est dans cette optique que ce n'est pas le point de vue de la victime qui prévaut au sein de l'intrigue, mais celui du pédophile, ce dernier étant d'ailleurs le personnage principal de Michael.
"Dans Michael, l’anormalité du criminel, la pédophilie, l’a amené à enlever cet enfant. Mais cela ne le distingue en rien, cela ne permet pas de prendre immédiatement ses distances vis-à-vis de lui", explique Markus Schleinzer. Le film pose en effet la question d'une identité, qu'elle soit "normale ou anormale", et c'est précisément ce parti pris qu'a voulu développer le réalisateur.
Michael illustre les tentations du criminel, notamment celle de vivre de manière très conventionnelle, d’être comme les autres, et d'observer les rites de la normalité afin d'oublier en quelque sorte son crime.
L'intrigue du film se cible sur la relation entre deux personnes qui vivent ensemble, et pose la question de "la nature" de celle-ci. Markus Schleinzer n'exclut pas le thème de la sexualité, puisqu'il constitue l'un des éléments qui fait partie de cette vie commune, maîtrisé par le criminel : "Je crois effectivement que c’est aussi cela qui fait peur dans ce film : un homme cherchant la normalité dans le cadre d’un crime extrême et qui vit pourtant comme beaucoup d’entre nous", confirme le cinéaste.
Dans le film, il n'y a aucun élément autobiographique : "Ni moi ni mes proches n’avons jamais été, de près ou de loin, confrontés à la pédophilie", assure Markus Schleinzer. Une fois l'écriture du scénario terminée, pour s'assurer de la crédibilité des personnages et de l'intrigue, le réalisateur a demandé à une psychologue reconnue d'analyser le personnage et son comportement. L'objectif de départ était de partir du point de vue et de l'univers de ce pédophile, et surtout de le faire de la manière la plus crédible qui soit.
Markus Schleinzer s’intéresse depuis longtemps à la manière d'aborder les criminels et à la notion même de criminel dans le débat public (plus particulièrement les sévices sexuels infligés aux enfants qui est, selon lui, le crime le plus fermement condamné dans la société) : "J’ai voulu tenter de trouver des réponses, et chercher à approcher ce sujet de manière franche, ce que permet précisément la fiction cinématographique", explique-t-il.
Michael a été présenté en Compétition, dans le cadre du 64e Festival de Cannes.