Technicien de cinéma, membre actif du réseau télévisuel britannique, Steven Knight fait ses armes en tant que réalisateur aux cotés de Jason Statham dans Crazy Joe. Malgré toutes ses bonnes intentions, le cinéaste plombe son film sous le poids d’un manque cruel de repères, d’indécision. D’abord film d’action, parfois un polar, un drame aussi, l’on ne sait ou situer Crazy Joe dans un contexte cinématographique pourtant d’ordinaire très clair. Là n’est pas un défaut, en soi, mais l’inefficacité du scénario, l’inégalité des séquences, font du film de Knight un malheureux modèle à ne pas suivre. Indépendamment de la présence de la vedette de la castagne du moment au casting, le film n’est ni plus ni moins qu’un long métrage trop vague, amorphe, qui ne laisse place qu’à l’indifférence. Dommage.
Alors que Jason Statham prend enfin le temps de composer un personnage plus développé, le scénario ne lui rend pas la pareille. Oui, si l’acteur, cascadeur et sportif n’est pas uniquement là pour dégommer et se battre, le scénario ne lui laisse que peu de place pour s’exprimer outre qu’avec les poings. L’effet voulu est donc annihiler par l’absence de quelque chose de concret à narrer. Dès lors, Statham, que l’on retrouve une voire deux fois par année, dans des films ou il tient à lui seul la vedette, enchaîne le bon et le mauvais. Si souvent, ses apparitions sont exclusivement tapageuses, d’autres sont parfois plus ambigües. Ici, il s’agit très clairement pour lui d’une erreur de parcours. Qui plus est, en voulant rendre l’acteur plus humain, Steven Knight lui assène une coupe de cheveux, longs, qui lui donnent un réel air de clochard, même si l’objectif était d’en faire un SDF.
Pire que tout, dans ce fourbis scénaristique, cette désolante reconversion d’une bonne sœur en femme actuelle, amoureuse, sexuée et prête à tout. L’on n’y croit pas une seconde, alors même que l’amour qui unit un gangster et une femme de foi est déjà, en soi, quelque chose d’excessivement délicat à mettre en scène. Avec beaucoup d’amateurisme, comptant exclusivement sur le charisme du beau dégarni pour donner corps à ses séquences, le réalisateur ne parvient jamais à offrir au public une réelle interprétation d’acteurs, coupés qu’ils sont par une mauvaise gestion du récit et l’incroyable mollesse de la mise en scène.
Un film hautement significatif d’un cinéma pour le moins inutile. Ni série B, ni Z ni quoi que ce soit, Crazy Joe n’est qu’un morceau de bobine inintéressante. Une perte de temps pour ses interprètes, un mauvais bagage pour son metteur en scène, très peu à en tirer si ce n’est quelques plans larges de Londres en pleine nuit, donc effervescence. Les retours en sa patrie, l’Union Kingdom, ne sont dès lors pas gage de réussite pour l’acteur vedette, maintenant très présent sur la scène US. Malgré les aprioris, la Grande-Bretagne ne produit pas que de grands films. 04/20