Les Crimes de Snowtown a été en compétition à Cannes dans la sélection parallèle Semaine de la Critique, où il a remporté le prix FIPRESCI (un prix décerné par un jury composé de critiques, ayant pour but de mettre en avant un cinéma de genre original).
La production cinématographique australienne, habituellement discrète sur les écrans étrangers, commence à attirer l'attention du public et de plusieurs festivals internationaux depuis 2010, avec des projets osés et de jeunes réalisateurs très talentueux. En plus des Crimes de Snowtown, l'Australie a produit la même année Sleeping Beauty, en compétition officielle au festival de Cannes, et le puissant Animal Kingdom, vainqueur au festival de Sundance (en plus de produire la suite de Happy Feet 2 en 3D et de coproduire de grands succès comme Le Discours d'un roi, Oscar du meilleur film 2011).
Les Crimes de Snowtown retrace l'histoire du serial killer le plus connu d'Australie, John Bunting. Doué d'une parole facile et d'un discours extrémiste, il a réussi à rassembler un groupe de personnes dans la région de Snowtown (à 145 km au nord d'Adélaïde) pour tuer de manière brutale onze personnes entre 1992 et 1999. Suite à ces faits, John Bunting a été condamné à la perpétuité.
Peu habitués aux histoires violentes, le réalisateur Justin Kurzel et le scénariste Shaun Grant ont hésité avant de signer pour la réalisation de ce projet. Mais en lisant le livre qui en est à l'origine, intitulé lui aussi Les Crimes de Snowtown, les deux hommes ont perçu le potentiel d'un film qui n'est pas centré sur les images de violence, mais plutôt sur ses origines. Comment tant de personnes auraient-elles accepté de suivre John Bunting ? Quelles conditions sont nécessaires pour convaincre une personne d'en tuer une autre ? Loin de vouloir excuser les actes de ce groupe de personnes, ils cherchaient à "comprendre le mal", selon Grant, "dans l'espoir que nous puissions en tirer des leçons et essayer d’éviter que cela se répète, car comme l'a écrit Shakespeare, le mal que font les hommes vit après eux."
Pour le réalisateur Justin Kurzel, le casting idéal des Crimes de Snowtown devait être composé d'acteurs de la région, des amateurs, sans aucune expérience avec le cinéma. Pendant trois mois, l'équipe a fréquenté les salles de concert, les centres commerciaux et les rues de Snowtown à la recherche de candidats potentiels. Ainsi ont été trouvés Lucas Pittaway, qui s’apprêtait à l'époque à s'engager dans l'armée en tant que mécanicien, Daniel Henshall, qui avait déjà eu de petits rôles à la télévision et au théâtre, et Louise Harris, approchée dans un supermarché au moment où elle faisait ses courses.
Quand le projet Les Crimes de Snowtown a été annoncé, il a immédiatement suscité la polémique dans un pays encore choqué par les événements découverts il y a douze ans. Le principal argument contre la production était le fait que l'argent public soit dépensé pour réaliser des histoires de meurtres. En effet, l'annonce d'un "film de serial killer" a donné une impression initiale d'exploitation de la violence, une idée très éloignée du drame complexe que le réalisateur cherchait à mettre en scène. D'après Justin Kurzel, "les gens ont immédiatement pensé que cette histoire ne pourrait être racontée que dans un film d'horreur. C'est bien pour ça que nous étions tellement soulagés de l'exhiber au Festival du Film d'Adélaïde, pour pouvoir finalement le discuter dans le bon contexte."
Avec un tel thème, la productrice des Crimes de Snowtown savait que le film allait attirer l'attention des journaux et des chaînes de télévision locales, mais toute l'équipe craignait l'image que les médias pourraient en faire. Le plus grand défi pour la productrice Anna McLeish était donc de communiquer à chaque fois le bon message, en répétant toujours que le film ne constituait en aucun cas une glorification de la violence.
En décidant de tourner un film sur les crimes de Snowtown dans cette même ville, les producteurs s'attendaient à trouver une résistance de la part des habitants. Ainsi, avant même que le financement (entre 2 et 3 millions de dollars australiens) soit trouvé, l'équipe a pris contact avec une association locale de victimes, afin de mieux représenter les faits en images.
Le directeur de la photographie Adam Arkapaw a proposé de tourner le film en 16 mm, un format peu commun dans le cinéma commercial, mais dont les caméras disponibles sont plus légères et plus petites. L'idée était de travailler plus vite, captant l'instantanéité des actions sans trop répéter, en plus de donner à l'ensemble une texture et un aspect plus authentiques.