Daniel Auteuil continue son hommage à Pagnol avec ce 1er film de "La Trilogie marseillaise". Je n'ai pas vu sa "Fille du Puisatier" de 2011, même pas en rattrapage sur Canal +, mais le tandem formé par lui-même et Kad Merad (en lieu et place de Raimu/Fernandel) m'attirait peu. J'ai "tenté" "Marius", et ne le regrette pas. Ce qui avait été d'abord une pièce fut porté à l'écran en 1931 (évidemment en noir et blanc), par le très cosmopolite Alexandre Korda (né Hongrois, il deviendra sujet britannique, après avoir tourné partout en Europe et aux E-U), qui réalisera en même temps 2 autres versions, l'une allemande, l'autre suédoise ! C'était l'auteur, Marcel Pagnol, qui assurait l'adaptation. Là, Auteuil signe le scénario en toilettant (son film dure 1 h 33, alors que la version de 1931 durait 2 h), réalise, sur un découpage classique, de manière fidèle (trop fidèle ? manquant de personnalité ?) et sans épate (évitant soigneusement les chausse-trappes des "scènes à faire" surlignées, comme celle de la partie de cartes), et assure le rôle de César. Les décors sont soignés à l'extrême, la photo est belle, le Marseille de l'entre deux-guerres parfaitement reconstitué, la musique (Alexandre Desplat) impeccable. Les dialogues - ceux de Pagnol - sont un régal, évidemment (les spectateurs rient et s'émeuvent, en 2013 comme en 1931 - talent éternel du grand écrivain). L'histoire est datée, parlant d'une époque où les jeunes filles convenables arrivaient vierges au mariage, où la contraception n'existait pas, où l'on discutait dot. Mais elle est aussi hors du temps, puisqu'il y ait question de famille, et d'amour, d'honneur (qui "comme les allumettes, ne sert qu'une fois") et de dilemme entre celui-ci et l'accomplissement de soi (lequel pour Marius est l'appel du grand large). On en arrive à l'essentiel peut-être, la distribution. Le couple de tourtereaux version 2013 est crédible (bien plus que Pierre Fresnay, 34 ans en 1931 mais paraissant plus, et surtout Orane Demazis, 37 ans !) : Raphaël Personnaz, dont la petite trentaine (superbe !) passe sans problème pour les 22/23 ans de Marius Olivier, et Victoire Bélezy, d'ailleurs voisine puisque montpelliéraine, la petite vingtaine, avec les yeux noirs ad hoc de Fanny Cabanis. Raimu en revanche (et l'ensemble des autres acteurs de 1931 du "cru": Charpin, Dullac, Alida Rouffe) continuent d'imposer leur empreinte dans les mémoires - la "Trilogie" étant régulièrement diffusée dans les ciné-clubs, télé comprise), et la comparaison avec les interprètes de 2013, pourtant excellents (et ne forçant opportunément pas sur "l'assent"), ne tourne pas en la faveur de ceux-ci (Darrroussin, Russo et Marie-Anne Chazel)... Nostalgie...