L’actualité plus ou moins récente des actes de pirateries au large des côtes somaliennes aura ouvert la porte à l’avènement, en 2013, de deux films de qualité. Oui, après l’excellent et intimiste Hijacking de Tobias Lindholm, voilà que Paul Greengrass, le réalisateur britannique considérer par certains comme le réalisateur d’action n° 1 de notre temps, livre sa vision soutenue de l’un des assauts criminels aux abords de la corne d’Afrique. Si l’on pourrait, à tort, rapprocher les deux films, il convient de spécifier que coté danois, le scénario aura d’avantage mise en avant la négociation, l’effet psychologique d’une telle rencontre entre marins syndiqués et pirates somaliens. Greengrass, lui, évite l’écueil des longues palabres pour centrer son récit sur l’action, d’où un rythme relativement soutenu dès lors que les pirates montent à bord du tanker. Pour situer chacun des films plus simplement, disons que l’un est une version européenne, scandinave, et l’autre une version hollywoodienne. Inutile d'aller plus avant.
Pour autant, si Capitaine Phillips semble se positionner comme un film spectaculaire, il n’en reste pas moins un puissant récit psychologique, lui aussi. Si les négociations ne sont jamais de mise, le périple du capitaine, otage particulier des pirates, n’est qu’un flot incessant d’angoisse, de douleur, dans un face à face obscure entre le marin et son tortionnaire, ses quatre tortionnaires. Il faillait dès lors à Greengrass un acteur solide, une figure d’humanité tel que Tom Hanks. L’acteur offre une prestation physique remarquable tout en ne cessant jamais d’afficher un optimisme typiquement occidental. Les acteurs méconnus incarnant les pirates somaliens s’en tirent eux aussi avec un certain brio. Jamais exubérants, jamais caricaturaux, les acteurs africains sont indéniablement l’une des réelles force d’immersion du film. Alors que certaines critiques spécialisées ont vues en Capitaine Phillips un film patriotique et déshumanisant, en regard aux indigènes de la corne africaine, je trouve au contraire que l’humanité qui se dégage de toute cette violence, de ces affrontements physiques et psychologiques est tout à fait formidable.
Mais c’est avant tout l’immersion qui caractérise le film comme étant une réelle réussite. Oui, si le travail de Steady Cam de Paul Greengrass n’est pas apprécié de tous, j’ai trouvé sa réalisation, pour le coup, d’une qualité toute particulière. Oui, toujours dans le mouvement, les prises de vues ne font qu’accentuer une tension inhumaine tout le long du récit. A ce titre, la délivrance de l’otage par la marine américaine est un séquence d’une rare bestialité, une séquence qui n’est pas sans rappeler l’assaut final de Zero Dark Thirty. A l’exception d’une entrée en matière très lisse, le film de Greengrass est l’exemple même du film rythmé, du film dont le réalisateur s’emploie à le rendre attractif sur tous les fronts. Certes, si le déploiement des forces maritimes américaines autour du canot de sauvetage de l’Alabama semble disproportionnée, l’on reste captivé par l’issu que donnera Greengrass à son périple.
De mon coté, le bilan est donc très positif. Certes, Capitaine Phillips souffrent de quelques longueurs, d’un manque minime d’échanges entre personnages, mais globalement, le dernier film du réalisateur de deux des films de la franchise Jason Bourne est une réussite. Tom Hanks, quant à lui, fait à nouveau preuve du même talent que celui constatable sur le soldat Ryan ou seul au monde, à s’avoir une implication maximale dans son rôle, dans tous les sens du terme. A découvrir impérativement. 17/20