Attention, cette critique contient des spoilers.
La société a changé et God Bless America en dresse le portrait satirique, avec cynisme et humour noir. Une citation résume bien le film à lui seul : "A quoi bon former une civilisation si plus personne n'est civilisé ?". Frank est un américain banal, ravagé sans le savoir par sa rupture sentimentale. Malgré tout, il s'efforce d'être un bon père, un bon employé, un bon ex. C'est le genre de personne "normale", bien éduquée, mais qui ne parvient plus à sortir de la solitude. Frank remplis ses soirées avec la télévision, qui diffuse des horreurs dans lesquelles il ne se reconnait pas. God Bless America prend le parti d'une télévision qui serait capable de refléter l'image du monde, voire même de la modeler. Elle est tournée vers l'avenir, là où le cinéma appartiendrait au passé (voir la scène au cinéma : un documentaire sur la guerre avec moins de dix spectateurs). C'est pourquoi, lorsque Frank rejette la télévision, il rejette à son tour la société dans laquelle il vit, il rejette ses citoyens, il rejette ses valeurs. Il s'oppose au fait de rester regarder le monde décrépir, où sont encouragés l’égoïsme, la cruauté et la médiocrité. Son licenciement sera l'élément déclencheur, puisqu'il n'aura plus aucune raison valable de continuer à se battre. Accusé de harcèlement, alors qu'il tentait simplement d'engager une relation avec une employée, on le conduit à la porte. Dès lors, le film bascule vers une forme de vengeance envers la télévision. Ce qui a mon sens est l'idée très originale de ce film. Au lieu de se suicider, Frank décide de perpétrer une série de meurtres à l'encontre de personnes détestables vues à la télévision. Cette décision le conduit finalement a ressembler de plus en plus à l’Amérique qu'il critiquait plus tôt, puisqu'il cède à la haine. C'est donc par ce biais qu'il parvient à combler sa solitude, et le film prend la tournure d'un road trip très amusant aux côtés d'une jeune fille aussi tarée que lui. La morale de ce film, s'il y en a une, est bien complexe. Car la télévision aura finalement eue raison d'une personne saine. Peut-être est-ce donc cela : "qui que vous soyez, elle vous rendra fou".