Projet atypique puisqu’il ne s’agit pas d’une adaptation de série ou de manga ni même d’un remake de film oublié de tous, "Pacific Rim" n’en demeure pas moins un blockbuster très marqué qui peine à faire valoir son originalité. Il faut dire que les influences dont il se prévaut (on pense, bien évidemment, à "Godzilla" mais, également, à "Transformers", voire au combat final dans "Bioman") n’aide pas puisque, en mettant en scène des robots géants affrontant des monstres extraterrestres, "Pacific Rim" s’adresse forcément à un public très ciblé et, en principe, repu de ce genre de spectacle. C’est sans doute la principale explication de son échec au box-office… qui me parait, certes explicable mais, tout de même un peu injuste tant il ne démérite pas en comparaison de mastodontes comme le dernier "Transformers : L’âge de l’extinction". En effet, bien que le film ait été vendu sur ces séquences d’affrontement dantesques, son intérêt (et sa plus-value) se trouve ailleurs… lorsqu’il évoque la menace représentée par ces Kaijus
échappés d’une brèche dans le Pacifique
. Le récit de leur apparition ainsi que les premiers affrontements avec les Jaegers (les machines créées pour les combattre) sont franchement réussis puisqu’ils ancrent le récit dans une relative crédibilité et rendent hommage au folklore japonais avec un respect dont les récentes adaptations de "Godzilla" n’ont pas forcément témoigné. D’ailleurs, on se dit que "Pacific Rim" est ce que le "Godzilla" de Gareth Edwards (sorti l’année suivante) aurait dû être… Les effets spéciaux sont à la hauteur de l’enjeu, on appréciera le décalage de certaines scènes
(à commencer par celles impliquant les deux scientifiques, campés par Charlie Day et Burn Gorman, ou encore le trafiquant d’organe de Kaijus interprété par l’inévitable Ron Perlman)
et la mise en scène est gentiment soignée. Le réalisateur Guillermo Del Toro parvient ainsi, à surprendre en s’éloignant de ses films habituels, plus viscéraux et, surtout, moins gigantesques (même si on retrouve un peu l’esprit des "Hellboy" par moment, avec ce côté bestiaire de monstres). Malheureusement, les habitudes ont la peau rude et on retrouve le défaut majeur de la filmographie du metteur en scène, qui, certes, sait nous en mettre plein la vue avec un univers souvent très riche mais qui souffre souvent d’une certaine pauvreté scénaristique. Car on peut difficilement ne pas faire le reproche à l’intrigue de "Pacific Rim" de se vautrer dans les poncifs hollywoodiens les plus éculés. Les personnages sont, ainsi, une galerie de caricatures ambulantes avec le héros (Charlie Humman qui ne s’en sort pas trop mal au vu de la pauvreté de son rôle)
traumatisé par la perte d’un être cher qui va devoir remettre le couvert après que son supérieur ait fait appel à son sens du devoir
, la jeune fille
revancharde
(Rinko Kikuchi sans grand intérêt)
qui vaut plus que ce qu’elle laisse paraître
, le chef autoritaire
qui cache un cœur d’or
(Idris Elba qui a été mieux ailleurs), l’ancienne gloire paternaliste (méconnu Max Martini) ou encore son fils teigneux
qui peut pas s’empêcher de bâcher le héros avant de la respecter
(Robert Kazinski). Les ficelles scénaristiques sont, à peu près, aussi grossières, puisqu’on a droit
au baroud d’honneur du chef au péril de sa vie, à la succession de sacrifices tellement prévisible… et même au coup du nez qui saigne (ce qui n’est jamais bon signe au cinéma
). Cette carence d’originalité se manifeste, également, dans la conduite du récit puisque les attaques de Kaijus finissent par lasser
(la surenchère ayant ses limites)
. Et ce n’est pas la BO (signée Ramin Djawadi), certes reconnaissable mais trop pompière et pas assez dramatisée, qui vient arranger les choses. On ressort, donc, de ce "Pacific Rim" avec un sentiment mitigé de spectacle, certes, spectaculaire voir enthousiasmant par moment (surtout dans le premier tiers) mais qui aurait pu (avec un tant soit peu d’écriture) être surprenant… ce que le film n’est jamais !