Comme l'indique pour certains le titre de cette "petite" critique, The World's End (ou Le Dernier Pub Avant La Fin Du Monde selon les traducteurs, très malins) avant d'être un film à part entière est l'accomplissement d'une œuvre qui se construit depuis plusieurs années, et je pense qu'on ne peut du fait pas évoquer le dernier volet de la "Trilogie Cornetto" sans évoquer ce qui l'a précédé et sans le doute le lien que j'entretiens avec l'œuvre globale d'Edgar Wright.
Tout d'abord, rappelons que même si tout ça s’est déroulé avant ma naissance, j'ai été élevé avec des comédies franchouillardes, des films mettant en scène Louis De Funès et Pierre Mondy avant de grandir avec les œuvres audiovisuelles de Les Nuls. Sans être hermétique à d'autres formes d'humour, j'en ai déjà un particulièrement tordu (je parle toujours d'humour) tout en ayant certaines exigences envers la qualité de tout ce qui porte une étiquette "On va vous faire rigoler".
Et il y a quelques années, en Art Plastique, matière qui était surtout pour moi un prolongement de la récréation, l'occasion de me lancer dans un concours de blagues relativement long (comme...'fin vous connaissez la suite), jusqu'à ce qu'un jour la prof décide de nous projeter Shaun of the Dead. En plus d'être une des meilleures heures de cours de ma vie, d'être un de mes plus beaux souvenirs du collège, c'est une véritable révélation : à notre époque la parodie peut ne pas être un sous-genre et on peut y raconter une vraie histoire sans se reposer uniquement sur des références hasardeuses et évidentes, au contraire de tout ce qui est fait dans Scary Movie pour ne pas citer d'exemple. Et en plus il y a des blagues sales et bien maitrisées.
Fasciné, je me renseigne sur le tiercé gagnant derrière cette expérience fantastique : Edgar Wright, Simon Pegg et Nick Frost.
Quelques années plus tard, je regarde avec la même étincelle dans le regard et dans le cerveau leur seconde grosse (comme...faut vraiment que j'arrête) collaboration qu'est Hot Fuzz, avant de me rendre compte qu'il s'agit d'une Trilogie, un peu à part qui se terminera en 2013 avec The World's End.
En attendant cette Fin du Monde annoncée je me décide à regarder la toute première fois qu'Edgar Wright, Nick Frost et Simon Pegg ont fait des trucs ensembles : Spaced, une sitcom complètement allumée qui traite de l'humour geek mieux que n'importe quelle autre série ne le fera jamais. Et il y a une phrase magnifique dedans, mais j'y reviendrais.
Il est intéressant de constater qu'entre chaque nouvelle œuvre, le trio semble mûrir, devenant de plus en plus "sérieux" tout en gardant ce côté complètement déjanté et anglais qui les a rendus célèbres Et Le Dernier Pub Avant La Fin Du Monde symbolise parfaitement cette idée. Avant de devenir un film de science-fiction c'est l'histoire de cinq potes qui décident de se réunir 20 ans après avoir tenté une tournée des bars pour...réessayer. Un peu de la même manière que Pegg, Wright et Frost se réunissent 15 ans après Spaced !
Et on retrouve donc ces personnages, amis d'enfance, plus ou moins contents de retrouver leur ancien "leader" campé par Simon Pegg : Gary King en contraste total avec eux. Cette histoire de cinq garçons plein d'avenir nous montre à quel point il est facile de grandir, parce qu'on nous l'a appris, mais pourtant tout aussi difficile d'accepter de vieillir. C'est un peu le thème récurrent, le fil rouge de la Blood and Ice cream Trilogy - et quoi de plus normal finalement quand on parle d'humour geek – mais il atteint son paroxysme ici, tellement la place accordée à la nostalgie et à la tristesse est importante.
Attention cela dit, The World's End n'est pas qu'un film où on pleure tout le temps. Enfin si mais de temps en temps on pleure de rire aussi, car malgré la sombritude et la tristitude de cet ultime opus, dans la réalisation comme dans le scénario on ne perd quasiment rien à la folie des précédentes œuvres. Les dialogues sont brillants, naturels et les acteurs excellents dans leur rôle. Mention spéciale à Simon Pegg et Nick Frost, complètement à l'opposé de ce qu'ils jouaient à leurs débuts et qui sont tout simplement parfaits. En parlant des rôles des débuts, n'oublions pas les références multiples à Spaced, Shaun of the Dead et Hot Fuzz en plus des références à d'autres films de science-fiction.
Car oui, Le Dernier Pub Avant La Fin Du Monde est officiellement une parodie de film catastrophe de science-fiction. Et c'est réussi, il y a des références à tous les thèmes qu'ont pu explorer les auteurs du genre. Mais pour tout ce que j'ai cité précédemment ainsi que pour la narration particulière d'Edgar Wright, le film peut vivre sans l'étiquette de parodie, c'est de la science-fiction réfléchie, logique et bien écrite, avec le côté fun. Au-delà de la parodie, c'est pour moi une comédie dramatique de science-fiction qui repousse les limites du genre en ne se cantonnant pas à l'humour, Au même titre que Shaun of the Dead était un vrai film de zombies et Hot Fuzz un vrai film policier mais en encore plus fort. De la même manière Alexandre Astier tente de le faire en France, en imposant ses comédies comme des « vrais » films.
Je reviens enfin à Spaced. Sans entrer dans les détails, à un moment donné les personnages expliquent qu'il faudra "Something Bloody Spectacular" pour que tout se finisse bien. Et c'est exactement ce qu'est The World's End, qu'on peut voir comme LA conclusion lointaine de Spaced.
Face à ces Monty-Python 2.0 qui achèvent leur œuvre commune (même si on espère les revoir ensemble) dont la grosse innovation par rapport à leurs prédécesseurs, en plus du fond encore plus poussé est le caca (poussé, caca...OK) je ne saurais que dire pour conclure, je n'ai pas envie de conclure (sauf avec une des actrices du film, à vous de trouver laquelle), car si je conclue ça veut dire que j'arrête de parler du film. Et je ne veux pas arrêter d’en parler.
Je ne dirais pas que The World's End est une révolution...
Je dirais que la Trilogie Cornetto relève du génie!