Difficile, très difficile de dire du mal de la troisième collaboration sur grand écran du trio magique Wright-Pegg-Frost, même si "Le dernier Pub avant la Fin du Monde" n'atteint pas les sommets de "Shaun of the Dead" ou "Hot Fuzz". D'emblée, on est frappé par les ressemblances avec "Shaun of the Dead" dont "Le dernier Pub..." reprend complètement la trame, à quelques nuances près : course-poursuite avec des assaillants hostiles (ici, les aliens ont remplacé les zombies), amitié virile, introspection et réflexion sur le sens à donner à sa vie. C'est sur ce dernier point que la nuance est d'importance : là où Shaun, quasi trentenaire, regardait (avec pas mal de réticences et par la force des choses) vers l'avenir (vie de couple, responsabilités...), Gary King et ses amis, eux, quadras, ont pas mal l'œil dans le rétro. Comme leurs personnages, Wright et Pegg ont vieilli (mûri ?) et ils brossent à travers cette bande de cinq potes un portrait touchant de quadragénaires, un portrait aigre-doux où les souvenirs de bons moments côtoient les espoirs déçus, les échecs, les blessures. Et c'est presque dommage que cette belle évocation soit cannibalisée par l'apparition intempestive d'aliens infiltrés parmi les humains. Ce rebondissement dans l'intrigue, tel un cheveu sur la soupe, est certes extrêmement fun mais crée des ruptures pas toujours bienvenues dans le rythme du film. Et puis surtout, le message qu'il véhicule, l'avertissement sur les dangers de l'uniformisation et de la communication globale, aussi pertinent et jouissif soit-il, reste quand même très, très simpliste. Sur le papier, les noms des acteurs choisis pour incarner les cinq copains et la perspective de les voir s'envoyer à la tronche bon nombre de vannes bien ciselées s'avéraient particulièrement excitants. A l'écran, on n'est pas déçu : si les duettistes Simon Pegg et Nick Frost se sont donnés les beaux rôles, les seconds violons qui les accompagnent (Eddie Marsan, Paddy Considine et Martin Freeman) ne sont quand même pas des manchots niveau comédie et tout ce petit monde cohabite parfaitement à la fois dans la plus grande harmonie et dans le plus grand désordre potache. La touche féminine est incarnée à merveille par Rosamund Pike et Pierce Brosnan se paye une petite apparition, devenant ainsi, après Timothy Dalton dans "Hot Fuzz", le deuxième James Bond à figurer dans un film d'Edgar Wright. Car oui, comme d'habitude, le bonhomme n'oublie pas de rendre hommage à tout ce qu'il aime et qui l'inspire dans le cinéma et ici, outre les citations évidentes de classiques SF traitant d'invasion extra-terrestre ("Body Snatchers", "Le Village des Damnés"...), "Le dernier Pub..." se paye notamment à travers ses bastons avec les aliens un beau clin d'œil aux chorégraphies martiales de Jackie Chan ou Sammo Hung. Un petit mot aussi sur l'excellente BO qui compile à peu près tout ce qui se faisait de mieux dans la brit-pop des années 80/90 (Housemartins, Happy Mondays, Stone Roses, Suede...). Voilà qui rajoute encore une bonne dose de nostalgie à un film qui en procure pas mal, en plus de beaucoup de fun et de plaisir. "It's happy hour again..."