Yorgos Lanthimos considère que ce film entre en totale opposition avec son œuvre précédente, Canine. Le réalisateur déclare : "Ça raconte l'histoire d'une personne qui essaye d'échapper à un monde fictif. Alps expose au contraire l'histoire d'une personne qui essaye d'entrer dans un monde inventé."
Le réalisateur Yorgos Lanthimos aborde toujours son scénario en deux temps. En premier lieu, il lui faut une situation donnée, un point de départ. Ce n'est qu'une fois le scénario complet, dénué de signes concernant la direction artistique, qu'il peut y greffer des images, y ajouter des couleurs, des détails physiques, et commencer à imaginer à quoi le film pourrait ressembler.
Le tournage a débuté en octobre 2010. Certaines scènes ont spontanément été ajoutées lors du tournage, et les dialogues ont été en partie improvisés sur le plateau par les acteurs.
Alps tient son titre de la mystérieuse communauté dont il raconte l'histoire fictive, composée de membres qui remplacent, en échange d'un salaire, les gens qui viennent de décéder auprès de leurs familles. Ce nom en apparence anodin a été choisi car il ne révèle rien, en lui-même, des activités du groupe, et fait également référence au fait qu'une montagne peut en cacher une autre, mais jamais être remplacée ou échangée. Le leader de ce groupe à l'idéologie douteuse se surnomme par ailleurs Mont Blanc.
Tout le petit monde qui gravite autour du cinéma de Yorgos Lanthimos se croise et recroise au travers de leurs projets respectifs, comme une grande famille cinématographique en perpétuel mouvement : dans Alps, la jeune ennemie de l'infirmière (Aggeliki Papoulia) est interprétée par Ariane Labed, une actrice franco-grecque qui est aussi la compagne du réalisateur. Yorgos Lanthimos joue également dans Attenberg, un film d'Athina Rachel Tsangari, productrice d'Alps. Selon les mots du réalisateur, "Nous ne constituons pas un unique et gros groupe, mais une multitude de cercles d’amis qui se soutiennent les uns les autres."
Dans le monde d'Alps, le cinéma et les vidéos n'existent pas. Il s'agit d'une omission volontaire du réalisateur pour ne pas avoir à inclure d'images des défunts, et ainsi éviter une comparaison avec leurs remplaçants à l'écran.
Les personnages du film jouent sans cesse le rôle de personnes disparues, chères au coeur de leurs clients, mais une seule scène ne laisse aucun doute quant au fait qu'ils jouent bel et bien un rôle : lorsque le chef, Mont Blanc, imite Bruce Lee, dont la mort n'est plus un secret pour personne. L'ironie de ce choix tient dans le fait que Bruce Lee est mort pendant un tournage, et a ensuite été remplacé par une doublure.
La société Alps est régie par quinze règles bien précises (sur l'âge minimum des membres, leurs interdits comme leurs obligations), édictées par les deux scénaristes comme cadre de leur communauté. Pourtant, aucun des personnages ne parle jamais de ces règles dans le film. Non, Alps ne suit pas les mêmes règles de confidentialité que le Fight Club de Fincher. Seulement, Yorgos Lanthimos et son co-scénariste les ont rédigées... Après le tournage du film. Comme l'explique le réalisateur, "C’était plus amusant que de formuler une note d’intention expliquant le film ou une déclaration pompeuse. Cela nous a encore plus amusés de comparer ensuite ces règles avec le film, pour voir lesquelles étaient enfreintes."
Alps a été tourné dans le nerf de la crise financière grecque, une calamité qui a forcé leurs partenaires financiers à se retirer, ce qui a fait vaciller leur budget. Un phénomène de malchance qui n'a pas aidé l'industrie cinématographique grecque qui, selon Yorgos Lanthimos, manque cruellement d'infrastructures pour dénicher, puis enseigner à de nouveaux talents. Lui-même a appris à faire des films uniquement en regardant ceux des autres, ou bien par le biais de la publicité. Il cite notamment Robert Bresson, John Cassavetes, ou Jean-Luc Godard comme sources d'inspiration.
Alps faisait partie en 2011 de la sélection de la 68ème Mostra de Venise. Il a remporté un "Osella" du Meilleur scénario. Le film a également été élu "Meilleur film" au Sydney Film Festival 2012.