Avec la sortie prochaine de son Saint Laurent qui sera à coup sûr bien meilleur que le projet concurrent (pas dur), et après avoir vu son cours métrage Cindy the Doll is mine que j’ai beaucoup aimé, je me suis enfin décidé à voir un des longs métrages de Bonello et pas des moindres. Il faut dire que le court donnait envie, surtout grâce à sa fin qui montre que Bonello fait une putain d’utilisation de la musique dans ses films (mais ne vous inquiétez pas, là c’est pareil).
Que dire, si ce n’est que je suis venu, j’ai vu, et que j’ai adoré. Dès la première scène c’est un régal, putain voir ça et se dire « les mecs, on a là un putain de réalisateur, une putain de mise en scène, des putains d’actrices (et acteurs aussi tout de même) ! », ça fait drôlement plaisir. Parce que oui Bonello c’est vraiment un putain de réalisateur, ce mec a tout compris. Ça me fait doucement rire de voir tout le monde comparer le film à la série similaire sur Canal. Je veux dire je ne la connais pas, mais si elle a ne serait-ce qu’une once des qualités du film c’est un miracle. Alors lui être supérieure ! Qu’est-ce qu’il faut pas entendre. Bref, pour en revenir à la première scène elle est très belle, on a déjà là une magnifique ambiance qui ne nous quittera pas tout le long. C’est vraiment très prenant, hypnotisant, un peu comme le Lynch (le côté WTF en moins).
Le film raconte la vie d’une maison close, de ces filles qui s’aiment toutes, qui sont solidaires entre elles, qui éprouvent de la peine quand une est triste et de la joie quand elles sont toute joyeuses. Comme souvent lorsqu’on rentre dans un univers inconnu, une nouvelle recrue sert de vecteur pour nous le faire découvrir. Ici aussi on découvre la vie au ranch, les habitudes à prendre, on entre dans la communauté. Et malgré ce que j’ai entendu je ne trouve pas que les filles ne soient pas individualisées, au contraire, elles ont toutes leur caractère, les clients habituels, leurs anecdotes… Mais ce qui marque surtout, c’est la beauté infinie qui se dégage du film. Bordel, que c’est beau. Je parle ici autant formellement que sur le fond. On a des scènes géniales, comme ce champs/contrechamps tout bête entre Lvovsky et la nouvelle lors de son entretien, les plans sont longs, la scène magnifique et ce n’est pas la seule. Bonello filme magiquement toutes ces femmes, ces moments de sensualité triste, il film admirablement bien la tristesse, je pense qu’on a tous été marqués par la fin où la juive pleure des larmes de sperme. Et bien sûr il y a cette scène sublime avec Nights in White satin, un moment de grâce et de tristesse absolu. Clairement une des plus belles scènes qu'on ait vu en 2011. Quand je disais que le réalisateur utilisait la musique et les chansons à merveille (surtout que c’est lui qui s’en charge de a à z). La chanson est déjà magnifique en soi, alliée aux images c’est juste parfait.
Finalement, si le film est si beau c’est qu’il est vrai, du début à la fin. Comme je l’ai déjà dit, on sent l’amour réel existant entre les filles, le film est loin d’être glacé, il y a ce très beau moment où elles sont en sorties, rient beaucoup en se racontant des conneries, du genre Céline Sallette qui fait parler un tatouage sur sa cuisse, et se foutent à poil en sautant dans le lac toutes ensemble. C’est une très belle scène, très vraie justement. Et tous les personnages sont bien écrits, même les hommes sont humains, s’attachent à certaines putes, comme le mec qui écrit à Julie pour lui dire qu’il l’aime mais ne peut plus venir à cause de sa maladie. Et il y a bien sûr la juive, qui est presque le personnage principal, et qui transmet tout le long du film par son visage ce côté très humain et très triste, ce côté clown triste. La fin va dans ce sens.
C’est donc un film que je trouve magnifique, sensuel, d’une beauté infinie, réalisé par la main d’un dieu, et finalement très humain et très triste. Après avoir vu ça, on peut clairement se dire que Saint-Laurent risque d’être une bombe absolue ! (et tant mieux, vivement qu’on refasse le portait du film de Lespert).