Aprés le génial "Le discours d'un roi", Tom Hooper s'attarde sur les déboires d'un voleur de pain condamné à purger une peine disproportionnée par rapport à son crime, dans un Paris affecté par les inégalités sociales qui régnent, encadrées par une force de police anarchique et mobilisée pour éradiquer le peuple des pauvres. "Les misérables", dans toutes ses adaptations, mettait l'accent sur l'aspect torturé de Jean Valjean qui vivait pour une cause perdue. Dans la version américaine, c'est quelque peu différent. Le cinéaste s'attache aux liens qui unissent les personnages, aux déboires de tous et toutes mais n'entache pas son oeuvre de plaidoyers envers Dieu qui rendent l'ensemble pompeux. La scéne introductive est éblouissante, géniale, sensationnelle et nous transporte littéralement dés la premiére seconde. Un engouement qui s'atténue quelquesfois au vu des choix artistiques (qui donnent à critiquer mais qui ne sont pas forcément mauvais pour autant) d'Hooper. Si l'on peut contester quelques plans serrés qui rappellent trop souvent le coté "comédie musicale", la photographie agréable (et loin de toute artificialité) rend l'ensemble de maniére générale parfaitement appréciable. Le casting livre une prestation d'ensemble homogéne et superbe, si bien que Russel Crowe et Hugh Jackman constituent presque un seul et même personnage soumis à une dualité. "Les miserables" n'est pas, à la base, une histoire que j'affectionne particuliérement. Mais quand les Americains s'attaquent au patrimoine légué par les français, je veux voir. Je trouve injustes certaines critiques qui reléguent ce film à une vulgaire adaptation supplémentaire qui enterrerait, selon elles, le culte écrit par Hugo. Alors non, Victor ne se retournera pas dans sa tombe. Il sera fier et ému, conscient des écarts opérés, et appréciera la vision d'un auteur passionné qui a su apporter son identité. Car Tom Hooper est un bienfaiteur qui respecte son ainé mais veut, parallélement, se différencier. Bizarrement, personne n'est scandalisé de voir que "Les miserables" a déjà fait l'objet de mille traitements ciné/téléphiliques qui n'apportent, hormis un casting différent à chaque fois, strictement rien de plus à l'oeuvre originale, mais dés qu'il s'agit de modifier quelques codes, tout le monde s'offusque. Et bien pas moi, puisque comme je l'ai dit, "Les misérables" je m'en tamponne un peu. Et une comédie musicale au cinéma, c'est trop rare pour passer à coté. C'est réussi, avec quelques imperfections certes, et cela fait plaisir de voir notre drapeau tricolore agité dans tous les sens comme si les Americains défendaient notre cause envers et contre tout.