Deux ans après avoir été couronné de succès avec Le Discours d’un Roi, le réalisateur Tom Hooper s’attaque cette fois-ci à un projet casse-gueule : Les Misérables ! Casse-gueule car le célèbre de roman de Victor Hugo en est à sa énième version cinématographique et il faut que Hooper parvienne à sortir son film du lot. Casse-gueule également du fait que ce long-métrage ne s’inspire pas du livre mais de la comédie musicale créée en 1980 et dont le succès international ne faiblit toujours pas. Alors, Tom Hooper est-il arrivé à surmonter le succès du Discours d’un Roi ?
Dans la France du XIXe siècle, l'ex-bagnard Jean Valjean prend en charge la petite Cosette, fille naturelle de Fantine, une jeune ouvrière tombée dans la prostitution pour subvenir aux besoins de sa fille qu'elle a malencontreusement confiée aux Thénardier, un couple de scélérats. Mais Jean Valjean, depuis sa libération, est impitoyablement traqué par l'intransigeant policier Javert pour n'avoir pas respecté sa liberté conditionnelle. On suit les différentes étapes de la régénération du personnage central Jean Valjean et de protagonistes qui vont l'aider ou le contrarier sur son cheminement vers la rédemption.
Que ce soit l’adaptation du livre ou de la comédie musicale, l’histoire reste la même et tout le monde la connais (ou presque). Pour ceux qui n’auraient pas encore pris connaissance de l’œuvre de Victor Hugo, ce film leur fera découvrir (en résumé, bien entendu) l’histoire des mythiques personnages de Jean Valjean, Javert, Cosette ou encore Fantine et leurs tourments. Quant à ceux dont Les Misérables ne leur sont pas étrangers, ils pourront découvrir cette version moderne et hollywoodienne. Pour ce qui est du scénario, je m’arrête-là.
Oui, je m’arrête-là car les répliques parlées ne sont que peu présentes dans le film. Presque inexistantes. Car Les Misérables est un film à 99% musical ! Chaque discussion, chaque pensée, chaque émotion exprimée est tout simplement chantée. Et là, il est temps de dire que pour voir ces Misérables, il faut être un fan des films musicaux, sinon, subir 2h30 de chansons lyriques peut s’avérer être une véritable torture ! Pour les habitués, la pilule est plus facile à passer. Même si certaines séquences durent bien trop longtemps faute de la longueur d’une chanson ou que l’ambiance musicale semble quasiment la même sur tout le film.
Mais ce qui démarque le plus ces Misérables des autres versions, c’est bien son casting dix étoiles ! Tous se prêtent au jeu du chant tout en livrant une performance digne de ce nom. Et si certains n’arrivent pas à atteindre le niveau de leur collègue, il compense leur faiblesse par une présence hors du commun. Cette remarque s’applique surtout à Russell Crowe, acteur non habitué au film musical, qui chante tel un paquebot, mais qui possède un charisme et une présence inoubliable. Hugh Jackman est très bon, exprimant ces pensées et émotions dans le chant et le regard. Amanda Seyfried, nouvelle coqueluche hollywoodienne depuis Jennifer’s Body, arrive enfin à se faire remarquer à sa juste valeur. Helena Bonham Carter et Sacha Baron Cohen sont de parfaits Thénardier, apportant une touche comique bienvenue au film. Mais franchement, la personnalité qui sort irrémédiablement du lot est bien la charmante Anne Hathaway, qui rayonne aussi bien en interprétant son personnage qu’en chantant. Une véritable merveille !
Et voici le point faible des Misérables : sa mise en scène. Je ne passerai pas par quatre chemins : elle est loupée ! Tom Hooper a eu la mauvaise idée de se concentrer essentiellement sur les personnages en ne faisant que des gros plans sur ses acteurs. Si l’ambiance étouffante que cela offre servait d’atout au Discours d’un Roi, il s’agit ici d’une quasi torture. En effet, la caméra ne fait que fixer les protagonistes, les suivre, au point qu’une séquence peut être le plan d’un acteur chantant toute une mélodie, sans fin. Si cela peut être digérable durant la première partie du film, le reste du film (l’histoire d’amour entre Cosette et Marius) s’en retrouve affecté par un ennui qui pointe bien trop souvent le bout de son nez. Et surtout, quand on parle d’une version moderne des Misérables, on pense aussitôt aux décors, costumes et techniques numériques mis en œuvre pour mettre en image le livre de Victor Hugo. Si tout est bien là, aucun d’eux n’est réellement visibles à l’écran, puisque la caméra est constamment collée aux personnages. De ce fait, toute notion d’épique ou de spectaculaire est absente du film. Faire chanter en live les acteurs était une innovation pour un film musical. Mais vu la mise en scène, il faut croire que pour obtenir du bon son, Tom Hooper devait jouer les pots de colle avec ses interprètes, gâchant malheureusement l’ensemble.
Si on est fan des films musicaux, Les Misérables auraient pu être un très grand cru grâce à ses chansons et ses interprètes. Mais avec une mise en scène qui retire la moindre émotion et qui provoque une certaine gêne et un ennui certain, le film fera fuir les non-initiés au genre et même grincer des dents certains habitués. Personnellement, je me suis concentré sur l’ambiance musicale et les acteurs, et j’ai trouvé que Les Misérables était un divertissement sympathique et regardable. Mais bien entendu, cet avis ne concerne que moi ! Même si j’aurais voulu vivre un rêve chanté comme le promettait la bande-annonce…