Thriller plutôt pâle en plein Afrique du Sud contemporain, usant d’une corde sensible pour faire valoir une psychologie post Apartheid délicate. Ne nous voilons pas la face, le dernier film de Jérôme Salle, l’homme derrière les deux adaptations mitigées de Largo Winch, n’est pas une réussite marquante, de loin s’en faut. Pourtant, la trame narrative, ce rapport entre thriller traditionnel et traumatisme d’une nation, avait de quoi plaire, de quoi soulever quelques pierres pour creuser habilement dans la nasse. L’Afrique du Sud, malgré le pardon prôner par Feu Nelson Mandela, reste et restera un pays meurtri, un pays ou violence et effusion de sang sont monnaies courantes, ou l’écart dantesque entre la classe aisée et la pauvreté rythme le climat social et politique du pays. Ici, c’est au Cap que Jérôme Salle pose ses valises, dressant un portrait tout en nuance d’une ville qui se veut le fleuron national du développement mais aussi l’une des plus violentes des métropoles africaines.
Appuyé par un casting hollywoodien relativement solide, Forest Whitaker étant incontestablement le maillon fort, le cinéaste français semble plutôt bien négocier son véritable virage vers une renommé internationale. Pourtant, si le Zulu, soit Whitaker, est excellent, nous ne pourrons toutefois pas en dire de même d’Orlando Bloom, l’acteur sortant d’un long périple aux cotés de Peter Jackson ou encore d’une saga de pirates que l’on ne présente plus. Oui, si l’on attendait le bonhomme au tournant dans la peau d’un flic torturé par son passé, l’alcool et un mariage raté, l’acteur ne semble capable de composer autre chose qu’un simple Playboy Bad Ass qui tourne en rond et qui ne s’appuie que sur quelques références du même accabit. Loin d’être mauvais, Orlando Bloom est pourtant à mille lieues de ce qu’il aurait pu être, soit un personnage oh combien captivant dans la lignée des flics torturées de James Ellroy ou encore de Jo Nesbø.
Rien n’est pourtant transcendant dans l’intrigue distillée par le réalisateur, le trame policière n’étant finalement que très accessoire dans la bonne lecture du film. Déçu par un manque cruel d’enjeu, par un scénario parfois bidon qui laisse entrevoir les limites de l’écriture, le film se démarque tout de même par ce coté typiquement africain de la perception de l’Apartheid. Très fidèle aux paroles de Nelson Mandela, le noir, lui, semble avoir pardonné, semble pouvoir vivre selon les sages résolutions du président maintenant disparu. En somme, le personnage noir a pardonné aux blancs. Le flic blanc, quant à lui, renie son appartenance à la lignée des Afrikaners, rancunier des aïeux, bourreaux racistes auxquels il n’admet pas appartenir. Le résultat du récit policer entraînera une inversion des rôles, le noir prenant tout à coup conscience de son penchant pour la vengeance, refoulée, et le blanc revenant les pieds sur terre et faisant enfin inscrire le nom de son père sur sa pierre tombale.
Oui, le potentiel était fort, mais finalement, la mise en scène de Jérôme Salle s’est avérée insuffisante. Soyons certains que dans les mains d’un maître du genre, Zulu aurait été une œuvre majeure, quelque chose de très solide dans une filmographique. Nous pourrons alors regretté cette incapacité chez le metteur en scène, chez quelques uns de ses acteurs, a pouvoir transcender un récit qui avait de quoi heurter d’avantage. Pour autant, Zulu est un film qui se laisse regarder sans le moindre regret, c’est déjà ça. 12/20