Festival d'Alès, Séance Hommage à Michel Hazanavicius : "C'est mon premier film, que j'ai tourné comme une sitcom AB Production, vous savez, Hélène et les garçons...avec le flou, le son qui sature, les personnages bébêtes... Bon courage." Il nous l'a bien vendu, son film, et on s'est surpris à l'aimer, justement pour son côté joyeusement moche, classieusement moche, même. On ouvre Mes amis sur ce qui pourrait être une version française de Very Bad Things (1998), à savoir un speech simple : deux potes se réveillent avec un cadavre dans leur lit, et voudraient s'en débarrasser discrètement... Sauf que bien rapidement, le scénario attire notre attention ailleurs, comme si l'intrigue principale n'était pas celle que l'on croit, au profit d'une bascule totale dans le monde de la sitcom bon marché. Effectivement, on ne peut faire autrement que de remarquer les ficelles énormes qui sont celles des AB Production : le grain d'images est dégueu, légèrement vieillot par une teinte jaune pas vraiment définie, les angles sont arrondis, les cadrages sont kitchs à souhaits (c'est la fête aux zooms), les dialogues sont aussi bêtes que les personnages qui les prononcent, et le son sature tellement qu'on ne comprend pas ce qui est dit. On a lu les sous-titres, et franchement : merci, merci, merci. C'est d'audace qu'on a besoin, surtout en comédie française, un genre qui s'enlise avec complaisance dans la facilité (tant que ça rapporte), et ici on s'est régalé à regarder du moche volontaire, du moche qui dit "zut" à tous ceux qui sont trop propres sur eux, à ceux qui n'osent plus rien, qui s'engage avec panache dans la voie du film qui sait qu'il ne plaira qu'à un public de niche, et réussit son pari. Alors, bien sûr, la vie du studio de production nous a bien plus intéressé que les mésaventures "cadavériques", et le final arrive un peu trop abrupt, mais on s'est quand même bien attaché à ce duo d'amis interprétés par Yvan Attal et Serge Hazanavicius (qui nous fait jurer de voir son petit frère à chaque plan... Une ressemblance incroyable), on a souri à la vendetta du petit stagiaire contre le système corrompu du studio (le coup du café, qui se retourne contre celui qui a inventé le rituel, on valide), et surtout on a retenu que l'envie de sortir des clous, de parodier en s'appropriant des codes (ici, de la mocheté), c'est une constante "Hazanavicius" qui ne nous déçoit jamais. Classieusement moche, on vous dit.