Cyril Tuschi a entendu parler de Khodorkovski lors de la présentation de son précédent film, Sommer Hunde Söhne, à un festival de cinéma en Sibérie qui accueillait l'homme juste avant son arrestation. Le jeune réalisateur a donc eu l’idée, pour un prochain projet, d’écrire et de tourner un thriller mettant en scène le combat entre Poutine et Khodorkovski, le président et l’oligarque. Mais voyant que le sujet était très actuel et sensible dans le pays, il a décidé de ne pas installer de mise en scène imagée, et par conséquent d'en faire un documentaire.
Lorsque Cyril Tuschi parlait de son envie de réaliser un projet sur Khodorkovski à son entourage, certaines personnes ont trouvé bizarre de se lancer dans un film sur une quelqu'un qui "est un criminel, comme tous les businessmen qui se sont enrichis en Russie dans les années 90." D'autres avaient peur pour lui et lui disaient qu'il allait finir assassiné, comme Anna Politkovskaïa ou Alexandre Litvinenko.
Khodorkosvki, dont le tournage a duré quatre ans et le montage dix-huit mois, n'a pas de sortie prévue en Russie à cause de la crainte des exploitants née de la pression de l’Etat. Mais le réalisateur ne perd pas espoir, et réfléchit à trouver un moyen détourné pour y parvenir.
Plusieurs séquences ont été tournées en Russie. Le réalisateur avoue avoir eu peur : il enlevait tout le temps la batterie de son téléphone portable, de peur d’être suivi ou enregistré. L'équipe a d'ailleurs été suivie un moment, dans un train par trois hommes, mais sans menace ni harcèlement.
"Cet homme demeure une énigme", assure le cinéaste-documentariste. En effet, Khodorkovski, considéré comme un mégalomane, parvient à conserver un très grand calme et une très grande force du fait de toutes ces années de pression : il ne révèle ni ne laisse apparaître ce qu’il ressent. Cyril Tuschi explique : "Je lui ai demandé une fois s’il lui arrivait de rêver en prison. Il m’a répondu : "Je n’ai pas de cauchemar. Ce sont plutôt ceux qui sont responsables de ma situation qui doivent en avoir.""
Le film a été présenté en avant-première mondiale à la Berlinale, en février 2011, et a été très bien reçu, notamment par la presse russe. Cyril Tuschi avait déjà présenté un de ses films à ce festival, d'où le fait qu'il n'était pas stressé.
Le documentaire présente certaines scènes en animation parce que le réalisateur ne pensait pas rencontrer Khodorkovski en personne, il a donc cherché un moyen de représenter visuellement son "protagoniste-fantôme" en le mettant en scène dans des séquences de film d’animation qu'il a finalement gardées.
Cyril Tuschi a réussi à interviewer Khodorkovski pendant quelques minutes dans la salle d’audience où il attendait dans une cage, au moment du début de son second procès. Il avoue avoir été surpris par sa sérénité apparente et sa concentration.
Pendant toute la durée du tournage, Cyril Tuschi n'a réussi à obtenir aucune interview des membres de l’administration russe, ni d'aucun homme d’affaires installé en Russie qui entretient des relations avec l’Etat.