Magnifique film indépendant américain, "Take Shelter" fait l'effet d'une petite bombe dans le monde du cinéma dramatique. Un thème superbement exploité, d'une noirceur et d'une anxiété remarquablement retranscrites, à en donner des frissons. La famille est une des thématique centre du film, ou plutôt les relations d'une famille humble et modeste,dans un contexte éprouvant de crise économique. Famille progressivement bouleversée par les visions apocalyptique d'un père (Curtis LaForche) aimant et travailleur, à travers d'épouvantables cauchemars, visions, sensations. Un cercle vicieux qui va peu à peu étouffer Curtis, chaque jour plus stressé, apeuré et troublé que le précédant. Décidant d'agrandir l'abri tempête dans le but de protéger sa famille d'une prochaine tempête meurtrière, dévorant les maigres économies familiales, s'emprisonnant dans sa bulle et son monde halluciné et incompréhensible aux yeux de tous, c'est la terrible évolution d'un homme, mi fou mi prophète, que nous raconte "Take Shelter". Une intrigue poétique, effrayante et extrêmement psychologique, très finement ciselée. Les visions catastrophiques du Curtis sont sublimes et poignantes, nous plongeant dans ces cumulus noirâtres et tonnants, parmi le vol de milliers d'oiseaux affolés, sous une pluie sale et visqueuse. Un incroyable crescendo accompagne cette fable abyssale et fragile, que Terrence Malick approuverait sans problème. La confrontation entre les désirs torturés et contradictoires de Curtis est éblouissante; la volonté de protéger ceux qu'il aime face à une solitude de plus en plus profonde, un enclavement dans une peur sans fond, sous l'inquiétude et la non-puissance de sa femme, sa petite fille, amis. Destruction de son entourage mais destruction de lui-même avant tout, Curtis LaForche se veut terriblement touchant et troublant, magnifiquement interprété par Michael Shannon. A ses côtés, Jessica Chastain fait preuve de talent, chargée en émotion et en passion. La réalisation est somptueuse, les paysages et les plans sont menaçants, agressant cette cohésion familiale en lambeaux, rendant les pensées de Curtis encore plus angoissante. L'apothéose de ce triste caste tête mental est émouvante et presque étonnante. "Take Shelter" est un petit bijoux de ce début d'année 2012, critique et envoutant : La beauté et la complexité de la fin du monde en 120 intenses minutes. 19/20