Je l'admets volontiers : ma passion aveugle pour Brian De Palma m'incite peut-être à l'indulgence ici. Pour autant, cette note n'est en rien un caprice, mais bien la reconnaissance d'une œuvre étrange, surprenante et nous emmenant toujours vers des directions totalement inattendues, ce qui n'est pas pour me déplaire. Alors c'est évident : les détracteurs du Maître ne manqueront pas d'arguments pour pointer un récit pas très carré, où l'auteur des « Incorruptibles » se plaît une fois encore à étaler sa technique à travers plusieurs scènes dont il a le secret. On peut trouver cela gratuit : personnellement, j'adore. Il ne faut pas oublier que le cinéma est un art, et quand il nous emmène vers ce genre de trip quasi-halluciné, mêlant fantasme et réalité au point de ne plus pouvoir distinguer l'un de l'autre, je me régale. Oui, c'est bizarre, et on ne comprend pas toujours tout : et alors ? Nous sommes aujourd'hui tellement rentrés dans une logique du « tout expliquer » qu'il faudrait ne pas apprécier un film capable d'aller bien au-delà de ça ? A ce titre, « Passion » se démarque d'ailleurs nettement de son modèle original, « Crime d'amour », bon polar signé Alain Corneau qui, pour le coup, nous expliquait bien tout du début à la fin, sans exercer le même pouvoir de fascination que ce remake, qui n'en est donc pas vraiment un. Le résultat ne plaira ainsi pas à tout le monde, à commencer par un dénouement allant très loin, mais ne devrait laisser personne indifférent, à l'image d'un duo d'actrices particulièrement sensuelle, la surprenante Noomi Rapace en tête. Personnellement je ne me lasserais en tout cas jamais d'un auteur (un vrai) fidèle à lui-même, maîtrisant à 300% son sujet et nous offrant des spectacles à mille lieues de ce que le cinéma peut nous proposer généralement aujourd'hui, sur le fond comme sur la forme : merci, M. De Palma.