Je n'y connais absolument rien en potagers mais visiblement, février, c'est la saison des navets ! Et le jardinier De Palma, on lui a connu -il y a bien longtemps, c'est vrai- la main beaucoup plus verte ! Il faut dire qu'elle ne doit pas être facile, la vie de Brian, complètement has-been à Hollywood et qu'on retrouve à la barre d'une coproduction franco-allemande avec "Passion", remake du dernier film d'Alain Corneau. Est-ce que les gugusses qui ont pondu le titre du film se sont rendu compte à un moment ou à un autre que le résultat serait en fait l'exact opposé de tout ce que le mot "Passion" promet ? Une intrigue passionnante, du suspense ? Pour les spectateurs qui ont vu "Crime d'Amour", c'est forcément raté. La passion amoureuse, de l'érotisme ? Les plus pervers se tripoteront éventuellement sur l'affiche mais pour le reste, un bac à glaçons dégage plus de sensualité vénéneuse que ce film. Une passion dévastatrice, de la violence ? Un petit égorgement en CGI et circulez, rien à voir. Alors, c'est sûr, "Passion" porte indéniablement la marque de Brian De Palma. Le problème, c'est que toutes ses petites manies de mise en scène si reconnaissables et si sympathiques sont placées dans le film de manière aussi incongrue que le distributeur Coca-Cola dans la scène du parking : le split-screen qui ne sert à rien, les plans-séquences qui tournent dans le vide... De Palma, c'est devenu du placement de produit ! Cela dit, le style bis et baroque, façon giallo, de la fin du film a quelque chose d'assez intéressant, à défaut de passionnant : De Palma y convoque -un peu artificiellement, certes, mais bon...- ses moments de gloire passés ("Sœurs de Sang", "Pulsions"...) et Pino Donaggio donne à son score des accents hermanniens, bien supérieurs à la soupe brouillonne composée pour la première partie du film. Ah, si tout le métrage avait été du même tonneau ! Et puis, il aurait aussi fallu soigner le casting. En plus du très mauvais Paul Anderson (pire interprétation d'un mec bourré de toute l'histoire du cinéma) et des seconds rôles allemands empruntés à "Derrick", le choix des deux actrices principales s'avère complètement foireux : Rachel McAdams joue comme une savate pendant tout le film et Noomi Rapace, aussi expressive qu'une chaise Ikea dans la première partie, devient totalement hystérique dans la seconde. Bonne prestation, par contre, de la jolie Karoline Herfurth même si elle n'avait rien à faire dans ce remake (eh oui, dans le Corneau, Isabelle avait un assistant, pas une assistante). Féminiser son rôle, pourquoi pas, même si ce changement scénaristique renforce le côté saphique du film et donne l'impression que son auteur en est complètement et dangereusement obsédé. Pour le coup, heureusement que "Passion" est totalement dépourvu d'érotisme : en plus de révéler Brian De Palma en vieux gâteux, le film l'aurait démasqué en vieux cochon.