Neill Blomkamp, réalisateur confirmé du prochain volet de la saga Alien, mais ça tout le monde le sait, revient en 2015 pour son troisième long-métrage, Chappie. Le réalisateur sud-africain, protégé d’un certain Peter Jackson, après avoir convaincu avec son District 9 et divisé avec son Elysium, est de retour avec un film finalement peu surprenant, tant dans le choix narratif que dans son esthétisme. Proche de ses travaux passés, sur le plan technique et visuel, Chappie est de ces films de Science-fiction qui s’affranchissent de l’esthétisme syndical imposée par les grands studios américains, préférant une mise en scène chaotique, inspirée notamment du jeu-vidéo et de la culture sud-africaine. Johannesburg est une nouvelle fois le théâtre d’une curieuse fable d’anticipation, cette fois-ci centrée sur les sujets de la robotique et de l’intelligence artificielle, certes des thèmes éculés mais plus ou moins novateurs dans le répertoire de Blomkamp. Oui, après les extraterrestres égarés dans les Townships et la déportation des nantis vers des cieux plus cléments, Chappie fait figure de nouveauté, de fausse nouveauté.
Attirant pour l’occasion dans ses filets deux vedettes américaines, Sigourney Weaver, dont on ne comprend pas trop l’intérêt de son implication minime dans le projet, et Hugh Jackman, arborant une coupe mulet d’anthologie, sans compter sur la présence de Dev Patel, la révélation de Life of Pi, Neill Blomkamp voit les choses en grand. Le cinéaste, maintenant suivi par une troupe de fans, admirateurs de son travail, de son inventivité technique et visuelle, se permet une promenade de santé dans des décors quasiment similaires à ceux de ses deux films précédents, sans compter sur la participation de son acteur fétiche, Sharlto Copley, que l’on ne verra à l’écran que sous la forme du fameux drone. Le réalisateur déroule, livre une fable dans l’air du temps, s’appuyant sur des références par paquets de cent. Mais le public n’était-il pas en droit d’attendre d’avantage d’un metteur en scène qualifié de révolutionnaire?
Certes, son Chappie est touchant, parfois presque enfantin, notamment dans les agissements de son héros mécanique, ce qui ne fût jamais le cas dans ses précédents travaux, plus sombres, mais l’effort est passablement vain. La signature visuelle des travaux de Blomkamp bouffe littéralement toute considération extérieure. Si j’apprécie fortement ses travaux sur la technique, les costumes et les effets visuels, la modélisation des drones est sublime, je ne peux que regretter l’absence d’évolution dans la carrière du réalisateur. Chappie, malgré une nouvelle thématique, pourrait parfaitement être qualité de troisième maillon d’une trilogie de science-fiction aux visuels similaires. Autant dire que l’on attend de pied ferme du renouveau pour le retour du plus célèbre des Xénomorphes, dans l’espace comme sur terre.
Voilà donc un film que se laisse regarder, très facilement malgré une certaine naïveté scénaristique, mais qui n’est pas forcément à la hauteur de la petite révolution que fût District 9. Blomkamp ronronne comme un vieux chat, malgré sa jeunesse, épuisant quelques cartouches sans trop s’activer sur le champ de bataille, préférant en garder sous le pied en étant conscient de son étiquette de néo-réalisateur. S’inscrivant donc dans une lignée prédéfinie de nouveaux genre de films de SF, Chappie, malgré des costumes géniaux, des personnages loufoques et curieux, des scènes d’action sympathiques ainsi qu’un petit lot d’humour, peinera à trouver une quelconque indépendance, donc un vrai public. On attend mieux tout en ne se plaignant pas trop. 12/20