Aimez-vous Hitchcock ? La question ne se pose même plus ! Oui, nous aimons Hitchcock !... Mais pas comme ça ! Quand Sacha Gervasi, jeune réalisateur et ancien scénariste, décide de se lancer dans un projet aussi ambitieux, il prend, ici, des risques considérables. Malheureusement le résultat est plat, consensuel et à l'opposé de l'oeuvre d'Alfred, qui, fou de rage, en ferait sortir Bates de sa cellule, pour terminer son travail !
Comme son titre nous laisse deviner, Hitchcock est un biopic retraçant un moment dans la vie du maître du suspense, le projet Psychose. Toute fin des années 60, Alfred Hitchcock, au sommet de sa reconnaissance, décide de se lancer dans un projet incroyablement risqué et va devoir faire face aux réticences des producteurs et de la censure. Il trouvera, en la personne d'Alma Reville, épouse et inspiration, la force de tenir au bout le projet le plus impossible de sa carrière.
Depuis l'année 1998 et l'horrible Psycho dégoulinant de Gus Van Sant, nous avions cru comprendre que toucher directement l'un des plus grands cinéastes ayant existé, était devenu prohibé. Pourtant, ce n'est pas ce qui a arrêté notre jeune réalisateur, qui a décidé d'adapter le best seller biographique de Stephen Rebello, Alfred Hitchcock and the Making of Psycho . Il est évident que le bilan est plus que mitigé. Commençons d'abord par les points positifs qui n'ont, à l'évidence, pas une place majoritaire au sein de l'oeuvre.
Souvent, nous apprécions regarder les films du génie en ayant tendance à oublier l'homme. Ici, c'est l'homme que l'on nous présente, avec ses faiblesses, ses moments de doute et son extraordinaire imperfection qui a rendu son oeuvre plus puissante que nous l'aurions cru. Mais surtout, nous avons le plaisir de faire le connaissance de “madame Hitchcock”, Alma reville, qui, femme dans l'ombre, a permis à cet homme d'exception de sélectionner les plus prodigieuses parties de son talent. A ce titre, Hellen Mirren campe un rôle parfait de femme froide mais humaine, grinçante mais tendre, impitoyable mais stimulante. Elle est sûrement la plus belle réussite de ce film qui se perd petit à petit dans un casting prometteur mais rarement à la hauteur.
Jamais il n'aurait été possible de le croire, pourtant Anthony Hopkins, acteur évident pour incarner la personnalité forte de Hitchcock, comme il l'aura fait avec Hannibal Lecter, n'est absolument pas crédible dans ce rôle. Grimé grossièrement et affublé de prothèses un peu trop voyantes, il est regrettable de le voir s'engouffrer dans un jeu tout aussi artificiel, ne rendant à la fois pas hommage à son talent et au talent de l'homme qu'il incarne. De la même manière Scarlett Johanson, qui a prouvé à multiples reprises qu'elle connaissait son métier d'actrice, ne correspond en aucun cas à Janet Leigh et, encore moins, à l'héroïne hitchcockienne, beauté froide d'une grande finesse et non pulpeuse sortant d'une œuvre de Woody Allen (Soyons sérieux!). Il ne suffit pas de nous offrir la star hollywoodienne en vogue, à la perruque blonde "brushingée", pour en faire une héroïne hitchcockienne, digne de ce nom.
Et tout comme le casting, la mise en scène a du mal à trouver sa place, face à une histoire d'une telle envergure. A plusieurs reprises, Gervasi tente des clins d'oeil cinématographiques à Hitchcock et, parfois, quelques scènes parviennent à attirer notre attention, mais le résultat reste, cependant, décevant. Le temps semble assez long et il est difficile de ne pas noter la vision complètement fantasmée du psychisme d'un homme qui ressemble à un criminel refoulé à des moments. La partie psychanalytique du film et l'association des personnalités de Norman Bates à son créateur sont désastreuses et complètement stéréotypées.
Finalement, l'oeuvre est sympathique à regarder par sa valeur anecdotique mais n'a aucune importance cinématographique. Il est peut-être tout aussi intéressant, voire plus réaliste de lire la biographie dont il s'inspire et apprendre du cinéma, ce que le maître du suspense nous a enseigné.