Voilà ce que c’est que de promettre un film à une amie : - Mais oui, t’inquiète, celui là je te le garde. Moralité, on a bien failli rater Nebraska ! Et ç’aurait été vraiment dommage. Je n'ai rien contre le dvd, mais qu’est-ce que j‘étais heureuse de voir ce film au cinéma. Découvrir son somptueux noir et blanc, entendre la salle bruire de rires, et la sentir comme moi peu à peu gagnée par l’émotion... Il faut beaucoup de talent pour faire d’un argument aussi convenu (un père et son fils, étrangers l’un à l’autre, se retrouvant à voyager ensemble) une histoire si emballante. Hormis le fils et son frère, quarantenaires maussades, leurs deux cousins bas du front, plus un gamin photographe, tous les personnages appartiennent en fait au 3ème voire au 4ème âge. Nebraka parle ainsi d’alzheimer, de dentiers, d’amours anciennes et de vieilles haines recuites. De l’Amérique rurale aussi, frappée par la crise, qu’Alexander Payne nous montre d’abord comme un pays de ploucs avant d’affiner son trait. Le casting est au petit poil, mêlant des acteurs chevronnés - dont le vétéran Bruce Dern (Sydney Pollack, Bob Rafelson, Hitchcock…) justement récompensé au dernier festival de Cannes, et l’impayable June Squibb qui joue la mère, mélange de méchanceté crasse et d’affectueuse clairvoyance – à des comédiens amateurs et des sihouettes prises dans la vraie vie. La mise-en-scéne est simple et élégante, Payne signe peut-être là son meilleur film. On en oublierait presque le scénariste, l’acteur Bob Nelson, le véritable auteur de ce petit bijou et de ces dialogues étincelants.