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La forme spécifique du film, le noir et blanc, et de nombreuses nuances de gris, contribuent pleinement à la simplicité de ton que le réalisateur tente de donner à son film. Cette simplicité rend de manière paradoxale une beauté spécifique et réaliste à Nebraska, à ce titre il serait bon de louer le travail de Phedon Papamichael (également directeur photo de James Mangold) pour sa sublime photo. Le naturel du regard posé sur ses personnages apporte une profondeur afin de mettre en avant leur côté humain. Portrait intime d’une famille qui tend autant vers l’émotion que vers le rire, par les personnalités des membres qui la composent. Sous ce regard exagéré et quasi trop fictionnel reste la magie naturelle, et finalement réaliste, d’un regard juste et précis.
Alexander Payne choisit d’inscrire intelligemment son récit dans le Midwest américain. Là encore, l’apport du noir et blanc est intéressant. Ce choix évite la redite classique, sinon cliché, d’appuyer sur l’aspect visuel d’une Amérique white trash, avec ses petites villes pauvres et sa population qu’on dépeint trop souvent de la même manière. Plutôt que de verser dans cela, les accents se portent naturellement sur l’aspect humain du film, mettant les personnages en avant. Bien que les paysages de ce road trip finissent par former aussi un énième personnage très important dans le film.
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La beauté du film se trouve également dans la performance de son casting, global, mais emmené par un Bruce Dern parfait dans son interprétation de Woody Grant. Il donne à ce personnage l’essentiel, entre tendresse, détresse mélancolique et acidité des répliques, le cocktail est parfait d’humanité. Il en est de même pour celle qui joue la septuagénaire la plus drôle de ces dernières années au cinéma, June Squibb. Quant au fils, interprété par Will Forte, son côté ingénu semble parfaitement convenir à l’évolution du personnage nécessaire à ce road trip.
L’enveloppe sonore, une bande son Americana, narre parfaitement le parcours d’un homme mais également la relation père-fils, souvent filmée, mais rarement de cette manière. Où parcourir un état s’apparente à traverser un passé pour donner/prendre le relais, et tendre vers un futur évolutif. Dans cet ensemble, l’allégorie de la poursuite de ses rêves semble être le seul point peu subtilement traité. Rien de gênant, quand dans un dernier plan, la formalité de la mise en scène clos le film sur la plus belle des scènes, comme un passage obligé de la vie d’un père.
L’authenticité avec laquelle Alexander Payne filme ses personnages et le milieu dans lequel il les dépeint force le charme finalement naturel de son long-métrage. Road trip en forme de parabole d’une vie, où se mêle de nombreux thèmes filiaux. Ce regard mordant, touchant, poétique, est finalement très juste, réussit à mélanger comédie et drame avec talent, puisque dans son final le ton léger de l’œuvre l’emporte, flirtant parfois avec l’univers des frères Cohen. On serait d’ailleurs peu étonné de les voir ensemble dans de nombreuses catégories au moment où les statuettes dorées seront délivrées en début d’année prochaine. Peu importe le vainqueur, puisque c’est un réel bonheur de voir de tels films à une époque où les blockbusters «mangent» tout. Parmi ce petit nombre d’îlots en 2013, Nebraska fait effectivement partie de grand, très grand état. Un road trip sans retour ne suffisant pas à en apprécier toute la saveur.