La bande-annonce diffusée dans les salles obscures m’a ensorcelé, rendu gaga, au point que j’aurai tué père et mère pour aller voir les nouvelles aventures de Jack Sparrow. Quitte à m’assoir sur les genoux de quelqu’un, rien ne m’aurait empêché de voir ce film le jour de sa sortie nationale, dussé-je me retrouver dans l’obligation de virer mon hôte s’il devait trop bouger… Plus sérieusement, la bande-annonce est une vraie merveille : l’ambiance y est délicieusement sombre ; on y voit une attaque de pirates digne de ce nom ; et la musique qui accompagne le tout est originale et parfaitement synchronisée avec chacun des gestes, des bruits de fers aux pas de Salazar. Et je ne parle même pas de l’apparence de ce forban, à vous glacer le sang ! En plus, la bande-annonce a le bon goût de se contenter de présenter le principal enjeu, sans trop en dire non plus. Si je devais noter cette bande-annonce, ce serait à coup sûr un 5/5, à défaut de ne pouvoir donner plus. Chers lecteurs et chères lectrices, je devine qu’en me lisant vous vous dites que je fais là plus la critique de la bande-annonce que du film lui-même. Pas de panique ! c’est là que j’y viens. C’est juste que je voulais vous dire que j’attendais de retrouver l’inquiétante ambiance mise en place dans la petite présentation. Alors qu’en est-il vraiment ? Eh bien les premières images confirment la tendance, et ça commence par l’emblème des studios Disney avec son château fétiche plongé dans la noirceur d’un immense nuage noir secoué par quelques éclairs, un nuage synonyme de mauvais présage. La première partie est de haute volée, ainsi que le prédisait la bande-annonce. Mais avant de poursuivre, permettez-moi de vous poser une question : vous souvenez-vous de la petite scène post-générique à la fin de "Jusqu’au bout du monde" ? Oui ? Non ? Peu importe. De toute façon, elle était restée inexploitée… jusqu’ici ! Je n’en dis pas plus pour ne pas spoiler, quoique j’en ai déjà trop dit. Mais quel plaisir de retrouver Sparrow et sa bande de mécréants. Le fantasque capitaine nous gratifie même d’une fuite dont lui seul a le secret, sauf que ce n’est pas vraiment lui qui mène la danse cette fois. C’est aussi l’occasion de donner le champ libre aux effets spéciaux, tous plus confondants les uns que les autres. Un véritable exploit quand on sait que reproduire l’eau des océans et ses vagues constituent le challenge le plus difficile à relever. De ce point de vue-là, ce n'est jamais trop malgré l'importante place accordée aux effets visuels. Pour être franc, "La vengeance de Salazar" est une débauche d’effets spéciaux. Et quand la définition de l’image est irréprochable alors oui, ça vaut le coup d’être vu au cinéma. Croyez-moi, question spectacle visuel et acoustique, vous en aurez pour votre argent. Ah oui : j’ai oublié de préciser que la bande son est tout simplement énorme ! Après, c’est une histoire de pirates de plus, avec ses mythes et ses légendes, et la dose de fantastique qui va avec. C’est plutôt bien construit, bien qu’on puisse déplorer quelques petites ellipses qui hachent un peu le récit, lequel est ostensiblement placé sous le signe de l’humour. Et c’est bien sur cette caractéristique que la surenchère s’est faite. Et trop c’est trop. Parfois ça tombe même à plat. Oh je ne dis pas que ce n’est pas bon. Il y a bien quelques situations qui valent leur pesant de cacahuètes. Mais ça ne fonctionne pas à tous les coups. A trop vouloir décomplexer, on finit par dénaturer l’essence même de ce qui a fait le succès de la saga. Surtout que j’ignore si c’est parce qu’il a vieilli, mais Johnny Depp a un peu perdu de sa superbe. Il faut dire que depuis "La fontaine de jouvence", six ans se sont écoulés. Et ça se voit sur le faciès de l’acteur, mais c’est encore plus flagrant sur celui de Geoffrey Rush, lui aussi un peu plus en peine. En revanche, Javier Bardem fait un diabolique capitaine Salazar, et le surnom qui a été octroyé à son personnage n’est pas volé. Quant à Brenton Thwaites, son personnage est bien le fils à son père ! Il a les mêmes attitudes. On notera aussi quelques incohérences, notamment quant à la récupération miraculeuse du compas. Des incohérences dues à ce dont je parlais plus haut : les ellipses malheureuses. Donc oui, "La vengeance de Salazar" manque parfois cruellement de précisions. Conséquence ou pas : le voilà promu comme le film le plus court de la franchise avec ses "seulement" 129 minutes. Bon après, le spectateur en attend beaucoup et devient exigeant. Normal après tout. Cependant je ne peux m’empêcher de penser que Gore Verbinski aurait mieux maîtrisé la réalisation que Joachim Rønning et Espen Sandberg réunis. Oh ils nous offrent quelques plans intéressants, notamment avec des prises de vues aériennes ou des traversées de vaisseau vertigineuses. Mais potentiellement ça pouvait être un chef-d’œuvre. Reste une photographie intéressante, bien qu’un peu moins riche. Quant à la musique, je pensais qu’il y aurait davantage d’originalité, comme semblait le promettre la bande-annonce. Et puis pas tant que ça en fait, le compositeur Geoff Zanelli se reposant beaucoup sur le travail abattu par Hans Zimmer. Tout n’est pas parfait donc, loin s’en faut. Mais ça reste quand même un bon spectacle à voir sur grand écran. Privilégiez les bonnes salles et restez-y jusqu'au terme du générique de fin... vous y découvrirez une porte ouverte sur un éventuel sixième épisode...