Tout le film semble n'être qu'un support construit pour recevoir l'une des dernières scènes, palpable d'une émotion étirée entre le malaise et l'érotisme (bien plus, d'ailleurs, que la scène de sexe qu'elle précède et anticipe, au point de revêtir un caractère fantasmatique, ensorcelant). Cette représentation -le lien entre hystérie et performance scénique étant très vite souligné- contient à elle seule le renversement presque géométrique du système que la fiction avait d'abord dévoilé tout en étant son prolongement logique, son re-jeu: le soudain épanouissement d'une femme, irrémédiablement consciente de son pouvoir sexuel. Ce qui dérange surtout, c'est cette insolence (au-delà de sa bienveillance, ou justement, génialement, à cause d'elle) se livrant en spectacle. Cette victoire terrassante, preuve de l'irréductibilité de l'être à son aspect physique, charnel et visible par tous, seuls deux personnages, parmi la foule des spectateurs, en sont finalement témoins: Charcot et Augustine. Le docteur et la bonniche. A la fin, on n'est pas bien sûr de qui fut guéri par l'autre, la paralysie partielle d'Augustine abolie par une simple chute d'escalier et en aucun cas grâce aux "soins" médicaux de Charcot. La fin c'est le dispersement de la brume, du corps et du monde, entre lesquels Winocour tissent des circuits souterrains, sortes de collages discrets de sensations.
Par ailleurs, le combat de petit soldat d'Augustine servira, par le biais d'un intérêt plus large et ainsi, d'une plus grande subvention accordée aux recherches de Charcot, à la libération des autres femmes, qu'on aura aperçues dans les apartés godardiens, peut-être moins victimes de leur propre corps que de celles de l'incompréhension médicale et des tabous archaïques. Mais ce combat est avant tout celui, contre l'écran, de Soko, la dernière possédée.