C'est à partir d'un postulat ultra-simple et maintes fois exploré que Noémie Lvovsky signe un film pétillant et charmant, empreint d'une grosse dose de nostalgie. Avec un sujet vu et revu, il aurait été facile de tomber dans le piège du poncif et celui de la facilité, mais l'actrice-scénariste-réalisatrice s'en tire avec les honneurs sur ce coup-là. Car "CAMILLE REDOUBLE" n'est pas loin d'être une vraie réussite dans son genre, une œuvre à la fois simple et profonde, à la fois sympathique et intelligente, chose que l'on voit (malheureusement) bien trop rarement dans le paysage de la comédie française. Même si il est vrai que le but principal de ce film n'est pas vraiment de nous faire éclater de rire à tout bout de champ, on en ressort néanmoins avec la banane, comme si le sourire et la bonne humeur de Lvovsky, permanents et radieux, nous avait contaminé.
Au cours de ce long-métrage d'une grande sincérité et d'une belle mélancolie, cette-dernière nous sert sa vision idéaliste du passé. C'était mieux avant alors, back to the 80's !!! On sent parfaitement le plaisir, carrément contagieux, qu'elle a pris à s'offrir une période "revival", une seconde jeunesse sur grand écran au rythme enlevé des tubes rock et new-wave de l'époque (même si, allait comprendre cette incroyable anachronisme, on y entend une chanson intradiégétique d'Asaf Avidan datant de... 2012 !!!). Et entre les premières boums, les premiers baisers, les doudounes fluos et les cassettes que l'on charge dans son baladeur, Lvovsky n'oublie pas d'effectuer un petit travail introspectif, comme sur la construction des souvenirs, devenus au fil du temps des voix indistinctes et lointaines perdues dans leurs propres échos ; ni de nous interroger sur le rapport au temps : doit-on à tout prix corriger toutes nos erreurs ou doit-on les accepter car elles font parties de nous ? Doit-on tout faire pour changer le cours des choses, surtout les plus tragiques, ou les admettre telles qu'elles sont ?
Outre son énergie et sa convivialité, "CAMILLE REDOUBLE" marque des points car il ne prend pas son public pour un débile dont le cerveau n'aurait pas été du voyage. Pour preuve, il ne verse jamais dans le pathos larmoyant, même lorsqu'il s’épanche sur le terrain - souvent ardu car rempli de traquenards dans lesquelles les scénaristes et producteurs aiment à se jeter, du romantique et du bouleversant. Et la pléiade d'acteurs composant son casting agissent comme de véritables atouts : de Yolande Moreau et Michel Vuillermoz en parents aimants et trop vite partis, à Jean-Pierre Léaud en bijoutier complètement foldingue, en passant par Riad Sattouf en prof de théâtre allumé ou Denis Podalydès en prof de sciences touchant et touché, les petits numéros personnels rajoutent énormément d'attrait à ce film. On en oublie même vite l'incrédibilité totale et limite grotesque de voir Noémie Lvovsky incarner elle-même, du haut de ses presque 50 printemps, cette ado de 16 ans perdue entre deux espaces-temps, et on se laisse facilement prendre au jeu.
Grand perdant de la 38ème Cérémonie des César, avec zéro récompense attribuée sur treize nominations (dont meilleur film, meilleur scénario, meilleure actrice pour Lvovsky et meilleure réalisatrice), "CAMILLE REDOUBLE", qui navigue avec brio entre "Retour vers le Futur" et "Peggy Sue s'est mariée", est une véritable cartouche de fraîcheur dans le stylo-plume que chacun arbore dans sa trousse à l'heure de la rentrée des classes.
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